IL n'était pas difficile de résister à la tentation quand on ne l'a jamais connu. Je n'ai jamais été tenté par l'alcool, une ou deux fois, j'avais bu un verre ou deux de temps à autre et tellement peu habitué j'étais déjà en train de planer au septième ciel en même temps je n'étais pas du tout habituée, alors forcément il m'en fallait peu. Le jour où Kennedy avait préparé un petit cocktail molotov qui avait bien failli partir en cacahuète pour être honnête. Ah cette nuit là, dire qu'il n'avait que onze ans, et déjà aussi intelligent. Cet épisode était resté bien secret dans nos vies entre Lullaby et Kennedy et moi. C'était notre petite histoire. C'est une question de volonté, et de grandir trop rapidement je suppose. dis-je toujours en train de me balancer sur mon hamac. Je ne la regardais, je regardais dans le vide.

Quand je suis allée le voir et qu'il m'a balancé une liasse de billets dans le visage pour ne pas que je perturbe sa petite vie familiale, ce n'est pas ce que j'appelle vraiment l'âme paternelle.

Je me relevais de mon hamac manquant de perdre tout mon atirail qui était sur mon ventre, pour la regarder dans les yeux. Première fois que je le faisais depuis que nous avions commencé notre conversation c'était quand même beaucoup de sacrifices. Parce que j'ai peur de perdre le seul homme qui m'a considéré comme sa fille et que j'ai le droit d'appeler papa même si je n'ai rien en commun si ce n'est le nom avec lui. Oui, il y avait des peurs de petite fille que l'on ne pouvait pas taire, celle de me faire abandonner avait toujours été la plus dure à accepter pour moi.

Enfant, on ne comprend pas pourquoi on a pas le droit. Au début on m'avait expliqué que c'était comme le lait. J'étais allergique au sucre. Quand on dit ça, ça parait simple, mais on m'avait pas qu'en plus il fallait que je me pique tous les jours, moi qui détestais les aiguilles. Même les aiguilles à tricoter me donnaient la chair de poule. Alors au début quand il fallait me faire les piqures c'était des crises qui pouvaient durer des heures où l'on ne pouvait pas me calmer. Ce n'était pas toujours facile à expliquer non plus. Au fur et à mesure on apprend et on en veut au monde entier de ne pas être comme tous les enfants, et on en veut aussi à celui qui nous l'a refilé quand on est en âge de comprendre ces choses là.

Ce n'est pas ta faute. C'est juste que je n'ai pas eu chance chromosoiquement parlant. dis-je à un sourire à ma mère. Le premier sourire que je lui adressais sans me forcer du moins. Puis, on vient au sujet de mon père biologique. Sujet que je détestais au plus haut point. C'est si dur à comprendre que quand on ne sait que la moitié des choses sur sa famille, Lullaby, Rhiannon et Luke ont eu leur mère, ils savaient d'où y venaient. Kennedy, Andrew et Grace ils ont tout de suite appris à dire papa et maman. Moi ? J'ai mis du temps à savoir ce qu'était un papa, je me suis posée beaucoup de questions et des pourquoi. J'ai tout ce qui faut, mais ce n'est pas facile. Ca n'a jamais été facile.

Je craquais complètement face à ma mère comme si, j'étais une adolescente, que je ne savais pas vraiment ce à quoi j'étais destinée. C'était stupide d'en arriver à ce point là Et je me pose ces questions à vingt huit ans. dis-je en soufflant contre moi-même. Soudain le mot que je ne voulais pas entendre venait de sortir de la part de ma mère. Séparer. Non.

Je ne veux pas perdre mon équilibre. Quand j'ai perdu Dylan et Leah, c'est pour ça que je suis revenue ici. J'étais bien, et je savais que je n'aurai pas de problèmes. Aujourd'hui je retrouve Dylan, pour perdre l'amour qui me donne encore un peu foi en ce que j'éprouve pour Dylan ? Je ne veux pas

Me parler plus tôt de mon père aurait pu être la solution mais est ce que j'aurai du être aussi prête à l'affronter. J'avais eu beaucoup de choses d'un coup, le coup de mon diabète, puis la famille à me reconstruire. Bref, différente chose. D'une certaine manière, j'avais envie de m'idéaliser ce père qui n'existait pas, qui m'avait bien détruite d'un coup. peut être. je ne voulais pas cette idée. Je ne savais pas la vie serait très certainement différente, en même temps, nous aurions eu une toute autre vie, si ma mère avait affronté ses parents et étaient restés à New York. Traverser le pays, pour pouvoir élever sa petite fille, elle avait eu du courage, c'était la seule chose que je pouvais au moins lui reconnaitre. Je me suis idéalisée un père qui ne l'était pas, je me suis construite une famille et aujourd'hui je vais bien.

Ne regrette pas ce que tu as fait. J'ai eu un bon père, Holden m'a élevé sans faire de différence, pour lui il est évident que je suis sa fille. Thimothy m'a donné un coeur, mais c'est Holden qui m'a fait connaitre l'amour qu'il pouvait donner. dis-je avec un sourire en déposant un baiser sur le front de ma mère.

Puis le pressentiment de ce qui se passait entre Dylan et moi. C'était étrange nous avions enfin l'impression de retrouver l'être aimé, et pourtant savoir qu'il est si loin de nous. Ce qui nous rattachait c'était notre fille Leah. C'est compliqué dis-je simplement. C'était mon premier amour, le premier qui avait cueilli la fleur aussi, j'avais dit oui, puis non, puis je ne sais pas.

L'homme de ma vie. Oui en tout cas c'était comme ça que je voyais bien mon petit amour d'ex-mari. C'était juste que je sentais que pour le moment j'étais bloquée. Bloquée dans le sens où je n'avais pas été présente pour élever notre fille. Je m'en voulais en fait, c'était ça. La culpabilité, je pense que c'était ce mot que je n'avais qu'en tête. C'était comme si on me le rappelait jour àaprès jour. Je savais que ma belle famille ne m'apprécierait plus comme avant après ce que j'avais fait à leur fils.

Pour autant, les nouveautés, le fait que Dylan soit venu vivre à Pasadena avec Leah changeait la donne. C'était lui qui me donnait une seconde chance. Il me donnait la possibilité de voir ma fille autant que je voulais. Il voulait que je vois Leah plus souvent que je la vois grandir et pourquoi pas nous donner une seconde chance aussi.

Tu l'aimes bien ? C'est vrai ?

C'était la première fois qu'elle disait ça de l'un de mes petits copains ou encore de quelques soit nos maris et femmes. Zeppelin ou encore Aiden n'avait pas cet honneur non plus.

« Disons que ce n’est pas forcément les choses que tu dis de Zep’ ou d’Aiden, pourtant ils sont plus légitimes que Dylan, ils sont mariés ou presque avec ton fils et ta belle-fille ? » dis-je en souriant. Dylan était quelqu’un d’exceptionnel dans l’idée, je ne pouvais pas me permettre de le perdre, mais il n’était pas forcément facile de se dire ça comme ça. Du jour au lendemain, nous en étions bien à cela. Je savais bien que Leah ne souhaitait que ça, mais c’était bien plus compliqué que ça. Et revenir sur un divorce. Ce n’était pas si facile que ça. Je soupirais me remettant dans mon hamac et en me balançant à nouveau. Ce mouvement de côté devait me rappeler mon berceau d’enfance.

« Le ciel et les étoiles qui vont avec ? » dis-je d’une ironie totale « Je rigole, je n’en sais rien, c’est pas si facile, officiellement on est divorcé, on ne revient pas sur un divorce, du moins pas aussi facilement. Et puis même, il faut du temps, du jour au lendemain ça ne se fait pas comme ça, pif paf pouf, et on fait un petit frère et une petite sœur à Leah. » dis-je en me prenant la tête dans les mains. Trop de réflexion tue la réflexion. Et ce n’était pas une blague, ça pouvait donner une migraine monstre.