Je ne voulais pas que notre dispute avec Nikki affecte le petit Reed. C'était bête de penser ça, car c'était trop tard. Je l'avais entendu me dire de ne pas parler de la sorte à sa mère et dans un sens, cela m'avait calmée. Même si elle m'avait presque frappée avec une chaise, je minimisais ma réaction. Je ne voulais pas m'enfoncer encore plus. Et si jamais il se mettait à me détester parce que j'avais mal parlé à sa mère ? Après tout, il en fallait peu à cet âge-là. Je ne voulais pas qu'il me voie comme ça, car ce n'était pas vraiment moi. Enfin si, mais j'étais frustrée, énervée au plus haut point et pleine de... Haine envers cette femme qui avait osé les abandonner et qui prétendait les aimer malgré tout. Je voulais lui lancer des patates dessus ou même des œufs si seulement j'en avais sous la main. Ce n'était pas mon état normal, ça s'était clair. Mais n'empêche... J'étais loin d'être une bonne belle-mère à cet instant ou même une bonne fiancée... J'étais lamentable, je devais bien l'avouer. Je soupirais en écoutant mon homme, Caleb, nous faire la morale... Son regard n'avait plus rien à voir avec celui torride qu'il me lançait avant que ces deux intrus n'arrivent. Il parlait bien et il avait raison... Sur tellement de points... J'acceptais de me calmer, mais je n'allais tout de même pas me mettre à faire des câlins à Nikki, il ne fallait pas trop m'en demander non plus. Je lui lançais d'ailleurs un regard méprisant en l'entendant faire une réflexion avant de lever les yeux au ciel. "Tu t'es enfuie en le laissant tout seul avant..." Ne puis-je m'empêcher d'ajouter, elle m'avait tendu la perche, je ne pouvais pas m'abstenir de répliquer. Oui, il ne l'avait jamais demandé en mariage, mais moi si, et elle allait apprendre à vivre avec, car dans tous les cas, c'était de sa faute. Pas la mienne, pas celle de Caleb, la sienne et qu'elle soit contente ou pas, c'était comme ça. Je me dirigeais ensuite vers le fond de la pièce. Je n'avais pas du tout envie d'être seule à seule avec elle, encore moins de lui parler. Le seul truc dont j'avais envie en la voyant, c'était de l'assassiner. Quand elle me fit signe de m'asseoire, ce fut une goutte de plus qui vient s'ajouter à ma haine pour elle. Elle se prenait pour qui à la fin !? Il me suffirait d'ouvrir la fenêtre, de l'attraper par ses jolies jambes que je lui enviais tant et pouff ! Une quiche de moins sur cette misérable terre. Ou alors une prise de Kung Fu me suffirait pour la mettre Ko. Je pourrais aussi la frapper à mort avec des patates, mais ce serait un peu trop long... Mais je ne pouvais pas, c'était triste. Seulement, je ne voulais pas finir en prison et puis... Reed avait tout de même besoin de sa mère... Enfin, je pourrais la remplacer, mais je n'étais pas certaine que Caleb soit encore intéressé par moi si je tuais son ex... Mes plans farfelus restaient donc à l'intérieur de ma tête pour le plus grand bien de la population. Au contraire, prenant place sur la chaise avec laquelle elle m'avait menacé quelques minutes auparavant, j'allais même m'excuser. Mes mots sonnaient faux, j'avais l'impression de m'étouffer rien qu'en les prononçait, mais je m'excusais tout de même. Comme on dit, c'est l'intention qui compte... J'essayais, je faisais de mon mieux pour être sincère histoire de jouer le jeu jusqu'au bout, mais ce que c'était difficile... Je n'y arrivais pas et cela se voyait, je m'en fichais totalement. Elle non plus n'était pas décidé à s'excuser pour de bon. On savait toutes les deux que si l'on se calmait, c'était seulement pour les deux hommes présents dans cette pièce. Si nous avions été seules... Dieu seul savait ce qui aurait pu se passer. On se contentant donc de se regarder dans le blanc des yeux en se disant que l'on ne se supportait pas. Elle parlait même de ma bague et un sourire satisfait montait à mes lèvres. On savait toutes les deux que si l'on se calmait, c'était seulement pour les deux hommes présents dans cette pièce. "Ok... J'arrête de montre ostensiblement ma bague, si tu veux. Mais à la condition que tu arrêtes de hurler." Je n'en pouvais plus, elle m'avait crevé les tympans. "Ou encore mieux, arrête de dire à tout bout de champ que tu es encore amoureuse de Caleb." Non pas que cela me dérange... Mais un peu quand même. Je jetais d'ailleurs un coup d'œil à ce dernier qui se levait pour aller vers la cuisine. Oh... Parce qu'en plus, cette soirée allait finir en dîner en famille ? Et bien... Question revirement de situation, on était vraiment des pros. Quelque chose avait l'air étrange chez Caleb... Qu'avait-il ? Qu'est-ce qu'elle avait fait encore ? Oui, car dans ma tête, c'était forcement de la faute à Nikki. Oui, ne cherchez pas à comprendre ma logique, c'était une véritable énigme... Me tournant de nouveau vers elle, je repris... "Bon... Et si on essayait de se supporter un minimum ? Après tout, en ne peut pas se sauter dessus dès que l'on se croise... Ce n'est pas... " Je fus coupée par Caleb qui nous lâchait un petit cri. Je me retournais alors que Reed lui demandait ce qu'il y avait. Moi aussi, j'aimerais bien le savoir. " Ça va ?" J'hésitais à me lever... Il n'avait peut-être pas besoin de moi... Mais c'était visible, quelque chose n'allait pas, il y avait un truc qui cloche. Je détestais le voir ainsi, surtout quand je ne comprenais pas ce qu'il se passait. Je finis par lever mes fesses de la chaise sans regarder la brunette et doucement, je me dirigeais vers mon fiancé. Je passais la main sur son dos en signe de réconfort même si je ne savais pas pourquoi il était comme ça Puis je me baissais avant de commencer à ramasser le sucre.

Je rongeais mon frein, à l'écoute de ce qu'elle disait. Je ne pouvais pas m'énerver indéfiniment, en plus ça ne rimait plus à grand chose. Il y'avait Reed et Caleb à côté de nous. Je ne pouvais passer que pour l'hystérique de service, en plein dans la névrose. Ce que j'étais, probablement, un peu. Mais elle aussi. Je baissais le regard, en me griffant la paume de la main de mes ongles, sous la table, pour éviter de répondre avec agressivité. A la place, je lui adressais un haussement d'épaules. Un oeil en direction des hommes, pour reporter mon attention sur Cordélia, qui paraissait assagie, alors que j'essayais d'en faire autant. Exemplaires, nous étions. Pardonner. Le pardon, c'est une valeur chrétienne. Je devais pardonner. Au moins, essayer. Alors, essayons. D'autant plus qu'ici, ça résonnait pas mal. « D'accord. De toute façon, je viens de m'abîmer les cordes vocales. » Encore quelque chose que je pourrais lui reprocher. Mais, au lieu de ça, je la fixais, avec quand même un peu de haine dans les yeux, mais un peu moins qu'en arrivant. Je la laissais parler, écoutant attentivement ce qui sortait de sa bouche. Amoureuse de Caleb ? Moi ? Je fronçais les sourcils, avant de soupirer avec lassitude. « Je ne suis pas... » J'hésitais un instant. « ... J'ai le droit de dire ce que je ressens. Tu dis bien tout ce qui te passe par la tête, toi. » Zut, l'agressivité dans ma voix. Zut. Aussitôt, je me reprenais, me mordant la lèvre inférieure, du plus fort que je puisse. Je saignais de la lèvre, mais ça m'était égal, il fallait que je m'empêche de dire quelque chose de méchant. Peut-être qu'on avait atteint le quota de vacheries pour l'année, elle et moi. Ne fallait pas pousser le bouchon. Trop de vacheries tue la vache. Je fus surprise, quand elle me parla de nous supporter. Surprise, et à la fois, pas du tout. Je répondais par un léger sourire (pour le moins forcé.) « Je pensais la même chose. Ce n'est pas digne de la maturité. » Avouais-je pour moi-même, mais aussi pour elle, car, soyons honnêtes, dans l'histoire, j'avais bien la moitié de la responsabilité, comme elle. Nous avions chacune une moitié, j'aurais bien aimé aussi avoir une moitié de Caleb, je m'en serais peut-être contentée... Mais, qu'est-ce que je raconte. Je dis des bêtises. Puis, j'ai déjà un gros morceau de lui, j'ai Reed, qui nous lie, comme il nous avait séparés. Effectivement, la maturité, ça doit être quelque chose de chouette. Mais quand nous sommes toutes les deux, je crois bien que nos maturités respectives (on en a déjà pas beaucoup), s'estompent pour laisser place à la rancoeur et tout ce qui va avec. C'est presque désolant. C'est même désespérant, c'est sûr. Un jour. Un jour, la sagesse viendra. En attendant, j'allais me contenir. Elle avait raison, la Cordélia. Pas besoin de crier pour se comprendre. Pas besoin non plus de se lancer des objets. On est trop vieilles pour jouer à ça. Je pense... Est-ce que c'est ça, mûrir ? Oui, je mûris. Je suis un fruit. J'entendais ensuite le cri de Caleb, et Cordélia qui l'appelait, pour se lever et le rejoindre, m'abandonnant à la table, comme une carotte plantée en terre. Je ne bougeais pas, j'attendais, elle alla ramasser du sucre, tandis que je me retenais un peu de venir lui en casser sur le dos. Non ! La maturité. Je regardais le sol, joli carrelage. Plus joli que chez moi. Les meubles étaient pas mal aussi. Pas fait attention en arrivant. Bon, c'était le bordel, mais on s'en foutait. Reed était perturbé, lui aussi, de voir son père dans un état bizarre. Je me relevais finalement, me dirigeais vers eux, j'aurais pu proposer d'aider, mais j'allais plutôt vers Reed pour le prendre dans mes bras, même si on ne m'y avait pas autorisée. Je ne savais pas s'il allait accepter mon câlin, au pire, non, j'aurai quand même agi bien. Je n'osais pas parler, je n'osais pas demander à mon tour à Caleb ce qui se passait, j'avais entendu Reed le faire, et Cordélia juste après, je ne voyais pas spécialement l'intérêt de répéter la question une troisième fois. Mais le voir comme ça, me faisait un peu mal au coeur, quoi que je puisse en dire. Je laissais sa fiancée le réconforter, au mieux, j'allais en souffrir, au pire, j'allais m'en fiche. « T'inquiète pas ! » Disais-je à Reed en caressant sa joue. Décidément, trois pour le prix d'un. Trois inquiétudes. J'essayais de rassurer Reed, sans même savoir de quoi il était question, ce n'était peut-être pas grave. Et au fond, maintenant, ça ne me regardait plus vraiment. Même si je continuais à me sentir étrangement concernée par tout ce qui pouvait arriver à Caleb. « Caleb ? » Demandais-je malgré tout, pour ne pas non plus avoir l'air de me foutre de lui, et c'était pas le cas.

On ne sait jamais comment réagir à l’avance. Je n’avais jamais imaginé un jour avoir des nouvelles e lui. En fait, je ne savais même pas si j’allais en avoir. Il était peut-être mort au fond d’un terrier comme un lapin ? Peut-être étais-ce même devenu un type populaire comme Robert Downey junior ? Mon papa était peut-être Iron Man ? Mon papa, quelle idée. Ce mot lui convenait-il ? Je n’en étais pas réellement sûr. Je me sentais juste sous pression. J’avais l’impression d’avoir soudainement le poids du monde sur mes épaules. Je ne voulais pas jubiler à cette lettre et le juron qui échappait de mes lèvres le montrait totalement. J’en oubliais les chamailleries des filles ou même la présence de mon fils. J’en oubliais le monde qui m’entoure. Je voulais juste être Shrek et aller m’enfermer dans un bois. Je voulais être accueilli avec des farandoles par le tas de boue devant la porte. Je voulais pouvoir faire l’hélicoptère seul dans cette maison avec indignation alors qu’on frapperait dans ma porte. Bon trêve de délire. Il me fallait un démaquillant pour mon âme. Enfin de quoi démaquiller mon âme noircie et mes pensées sombres suite à cette lecture. Mon père m’avait quitté avant même que j’ai l’âge de connaitre l’éjaculation précoce ou avant même que l’on perce les oreilles de Caitlyn pour lui mettre de jolie boucle d’oreille. Je tentais les trois personnes qui m’entouraient. Je sentais la main de ma fiancée dans mon dos. Je sentais le regard de mon fils, de mon ex. Tout semblait être pourtant lointain. Je les entendais aussi. Tous les 3 qui me posaient dans le fond la même question mais je n’avais pas de réponses. Tout ce que je craignais de pouvoir sortir était le cri du coq et encore. Je n’étais pas amateur de basse court. J’avais ma poulette et ça me suffisait. J’avais le blues, oui. Un truc du genre. Je pouvais remercier mon père en tout cas. Ce chien… Cordélia ramassait le sucre et je restais comme un abruti avec le reste du paquet dans les mains. La fin tombait dans ses cheveux. Si je la chauffe, ça fera du caramel ? Non, je n’y pensais pas réellement. Je ne pensais à rien. Si j’étais une glace, je devais déjà être fondu tellement… je semblais… enfin inactif. Je sentais juste ailleurs. Non d’un popotin. Il fallait que j’agisse ou réagisse dans ce cas de figure. Je laissais donc ma langue taper contre mon palet en fermant la bouche sur le coup. Mais merde. Je me mordais stupidement la langue. Je soupirais aussitôt. « Génial ! », maugréais-je donc en levant les yeux. « Je me suis mordu la langue ! », disais-je dans une plainte mélangeant douleur et frustration. J’allais dans le frigo et je prenais une brique de jus de fruits. Comme si de rien n’était. Je prenais la paille que je piquais dans la brique avant d’en boire encore quelques gorgées. Cela faisait juste un bien fou. Je regardais rapidement le four sans vraiment savoir pourquoi et je relevais le regard vers eux. Ils devaient surement encore attendre des explications et comme un abruti, je n’en avais pas données. Je soupirais doucement en baissant le regard vers la sucette sur le plan de travail. Une grosse sucette en forme de cœur comme l’on trouve souvent les répliques pour le triple à Disney Land ou sûrement aux concerts de Maroon 5. Bien sûr, on achète des sucettes au concert de Maroon 5… Je ne sais pas ce qu’on y suce et je ne veux pas savoir. - file au couvent avant de dire plus de bêtises – Je relevais mon regard vers eux. « Ce n’est rien, je vais… prendre l’air enfin je vais chercher le diner ! », je reculais doucement. Des pas en arrières tout en les regardant. La lettre encore là et ouverture. Je prenais ma veste sur la route en les abandonnant alors que j’allais vers la porte. J’avais besoin de juste prendre l’air. J’allais devenir fou. Je ne savais pas pourquoi mais je voulais juste fuir. Oui, m’enfouir. Je me laissais balader dans les rues de Pasadena. Je marchais juste sans but et ça m’allait totalement. J’avais besoin de ça. J’avais besoin de m’oublier un peu. J’allais bien sûr chercher le diner mais j’allais aussi me poser à un bar pour un petit whisky !