Un accueil à la hauteur ?

Elizabeth attendait le retour de son mari avec impatience. Cela faisait déjà trois jours qu’il avait quitté l’habitat familial dans un but professionnel. Du fait de son passé, la danseuse était toujours terrifiée à l’idée que Wayne puisse rencontrer une autre femme qui lui fasse définitivement tourner la tête. Combien de fois entendait-elle parler de voyages d’affaires qui n’étaient finalement que des rendez-vous galants dissimulés ? Bien trop ! Elizabeth tentait de garder une confiance absolue en son mari. Mais ce n’était pas chose facile. Comme cela est dit couramment : « Ça ne vient pas de toi. C’est moi. » Aveuglée par l’amour durant sa jeunesse, elle avait entretenu une relation qui avait abouti au désastre, malgré les avertissements de son entourage. Avec Wayne, tout était différent. Personne ne l’encourageait à se méfier de lui, à être sur ses gardes et à ouvrir les yeux. A l’exception de son propre fils bien entendu qui n’était jamais parvenu à accepter son beau-père. Pourquoi ? Cela restait un mystère pour tout le monde. Peut-être n’acceptait-il pas l’abandon de son père biologique ? Elizabeth avait lu de nombreux ouvrages sur le syndrome d’Œdipe. Ce fameux lien passionnel d’un enfant pour sa mère. Malheureusement, elle n’avait jamais vraiment eu le courage de creuser le sujet. La blonde trouvait ce sujet beaucoup trop angoissant. Cependant, elle savait pertinemment qu’il lui faudrait un jour crever l’abcès une bonne fois pour toutes. Tout ce qu’elle espérait, c’était qu’aucun des deux ne souffrent de cette tension. Bien que les deux concernés, en particulier Wayne, lui aient affirmés que tout allait bien, la danseuse restait sur ses gardes.
 
Il était presque vingt heures du soir. Elizabeth avait confié sa petite dernière à sa fille aînée, et préparait la surprise qu’elle réservait à son mari. Après tant d’années ensemble, il lui semblait primordial de continuer à se surprendre et à faire plaisir à l’autre. Le salon était plongé dans la pénombre, à l’exception de très nombreuses bougies qui projetaient leur lumière sur les murs et la décoration. Une odeur agréable émanait de la cuisine. Celle du plat favori de Wayne : du saumon à l’oseille. Bon d’accord, le poisson n’est pas la nourriture la plus séduisante par son fumet. Mais l’important était de lui faire plaisir non ? La table à manger comptait trois bougies, leur service de mariage, et quelques décorations par-ci par-là sur la nappe en tissu de couleur rouge. Sur la table basse du salon reposaient deux verres de champagne, sur lesquels se reflétaient les flammes brûlant dans l’âtre. Quant à elle, Elizabeth arborait des longs cheveux ondulés à la perfection, relâchés en cascade. Ses boucles d’oreilles et ses bracelets scintillaient, et étaient en parfaite harmonie avec sa sublime robe sombre moulante. Oui elle avait quarante ans. Mais la danseuse possédait le corps d’une femme beaucoup plus jeune ! Il lui avait fallu plusieurs heures pour tout mettre en place. Si Wayne devait annuler son retour, elle n’en serait que plus déprimée. Alors qu’il était censé arriver dans une poignée de minutes, Elizabeth se positionna à quelques mètres de la porte, tenant une coupe de champagne dans chaque main, prête à adresser un large sourire dès que son mari ouvrirait la porte. Vous l’accorderez, si la personne ouvrant cette dernière n’était pas celui-ci, la situation serait alors des plus ridicules !

Un accueil à la hauteur ?

Wayne était à l'aéroport avec des collègues lorsqu'il reçut le texto de son épouse, tandis qu'il était en train de les briefer simplement sur le bilan de ce voyage d'affaires. Discrètement, il regarda son message. De toute façon, ils avaient déjà dressé tous les bilans qu'il fallait plus tôt, mais c'était question de se quitter sur une note positive. Les clients rencontrés avaient été satisfaits et avaient renouvelé pour une poursuite de leur projet, ce qui signait également encore une bonne année en perspective pour LifeIsSmile. Beaucoup avait ri du nom de cette entreprise, l'avait même raillée tandis qu'elle montait peu à peu en force. A présent, tout ce beau monde faisait moins le malin et certains avaient même tenté de racheter l'entreprise.
Les collègues de Wayne étaient habitués à ce que leur patron fasse plusieurs choses à la fois et pose les yeux sur son téléphone ou sa tablette alors qu'ils étaient en train de lui parler. En même temps, il en était toujours ainsi dans le monde de l'informatique, surtout sur son poste à responsabilité. Wayne était tout de même le cofondateur de l'entreprise, il en avait de grandes parts et depuis qu'ils s'étaient agrandis, l'entreprise possédait plusieurs succursales dans d'autres états du pays et prévoyait de se lancer dans l'offshore.
En lisant le SMS de sa belle épouse,  le brave homme sourit face à lui-même, ce qui lui valut quelques boutades de la part de ceux qui l'entouraient car le contenu n'était pas difficile à imaginer dans de telles circonstances. Les mots doux d'Elizabeth lui firent tant chaud au coeur que cela lui donna énormément de courage pour affronter l'étape suivante de son trajet de retour: prendre le taxi. Pour tout le reste de l'humanité, cela est un geste banal, mais pour notre singulier quadragénaire, il s'agit là d'un très grand effort. Traumatisé dans son enfance, il ne parvenait pas à se défaire de sa phobie des voitures, même si elle s'était nettement améliorée avec les années, autrefois il lui aurait été impossible de monter dans l'un de ses engins ce qui, dans sa situation, serait fort fâcheux. Cependant, avec son jean délavé, ses baskets et son pull âgé d'au moins cinq printemps, il n'avait pas fier allure et craignait un peu la surprise de sa chère et tendre, à qui il répondit aussitôt d'un "je t'aime" suivi d'un coeur. Ce genre de texto font adolescent, mais Wayne est resté un grand adolescent dans un monde d'adulte où il est pourtant parvenu à s'adapter. Il n' y avait que lorsqu'il rencontrait des clients ou faisait des présentations que Wayne était présentable, sinon le reste du temps, il portait des vêtements très simples, parfois avec une veste pour rehausser le temps. Mais chez LifeIsSmile, il était coutume de venir travailler en tenue décontractée.
Ce fut donc dans cet accoutrement casual qu'il ouvrit la porte de son appartement pour tomber sur le salon magnifiquement paré, plongé dans une ambiance tamisé et sensuelle, un parfum venant lui chatouiller les narines. La table était faite, de façon très méticuleuse. Il sourit. Mais le plus bel élément présent dans cette pièce était son épouse, la perle du tableau. Magnifique, souriante avec amour, deux verres dans les mains. Il sourit de plus bel, ancrant ses yeux dans les siens avec une immense marque de tendresse et une lueur chaude dans les iris. "Bonsoir mon coeur. Tu es magnifique..." souffla-t-il simplement en venant déposer un tendre baiser contre ses lèvres, délicatement. "Je le savais déjà que j'avais la plus belle femme du monde, mais là.... Je tombe amoureux de toi pour la millième fois." ajouta-t-il par la suite. Il déposa un nouveau petit baiser contre les lèvres de sa chère et tendre. Il avait l'air bien ridicule dans son pull et jean en comparaison à Eli, habillé avec tant de sensualité et de charme, parée comme une pierre précieuse. Elle n'avait rien laissé à part ce soir-là pour le séduire une nouvelle fois.  Il n'y avait rien de mieux que de rentrer fébrile d'un voyage d'affaires de plusieurs jours et de recevoir ce type d'accueil de la personne que l'on aime.

Un accueil à la hauteur ?

Lorsqu’Elizabeth entendit le son reconnaissable de la clé dans la serrure, elle se redressa légèrement et étira un sourire des plus naturels. Lorsque Wayne ouvrit la porte d’entrée et qu’elle vit son visage, ses yeux se mirent à pétiller tout autant que ses bijoux. Après tant d’années la femme était encore complètement sous le charme de son mari. Autant pour son physique que pour sa personnalité. Beaucoup de filles auraient pu être refroidies par l’état de ses vieux vêtements, mais la mère de Caleb les adorait. Ils reflétaient totalement le côté posé, calme, de leur propriétaire. Lorsqu’Elizabeth vit le bonheur se poser sur le visage de Wayne, le sien en fut décuplé. Il semblait aimer la surprise qu’elle lui avait préparée. Ce qui constituait une véritable victoire pour la femme. La « bouille » de son mari accentuée par son sourire la fit alors fondre comme au premier jour. Était-ce légal d’être aussi chou ? Dès qu’elle le voyait, tous ses doutes s’envolaient en un instant pour ne laisser place qu’à la passion. Elle se noya alors dans son regard alors qu’il se rapprochait d’elle doucement. La danseuse sentit le rouge lui monter aux joues lorsqu’il la qualifia de « magnifique ». Wayne lui donna alors un baiser plein de tendresse, comme lui seul en avait le secret. Elizabeth se sentit alors comme déconnectée du monde réel jusqu’à ce qu’il y mette un terme. Ce qu’il lui confia ensuite lui fit échapper un petit rire touché. Il était tellement adorable ! Comment voulez-vous avoir l’esprit clair dans de telle situation ? Devant tant de délicatesse et de compliments, elle se sentit alors comme une petite fille timide sans aucune expérience.

- Merci mon amour. Sache que je suis encore plus amoureuse que toi ! lança-t-elle d’une voix caressante et à la fois taquine.

Wayne vint lui échanger un nouveau baiser. Elle en profita alors pour se blottir contre lui, ses mains toujours occupées par les coupes de champagne. Note à moi-même : le prochain coup, si tu veux serrer ton mari contre toi : évite d’avoir les mains pleines ! se maudit-elle intérieurement. Elizabeth aurait aimé que cet instant soit éternel. L’osmose entre eux était parfaite, et l’absence de son mari durant ces derniers jours totalement compensée par la puissance de leurs retrouvailles. Elle mit très lentement fin à leur baiser et échangea un regard avec lui avant de poser sa tête contre son torse, ses poignets se posant contre son dos. Fermant ses paupières, la danseuse prit une grande bouffée d’air, un sourire aux lèvres, savourant l’odeur de son mari. Une odeur telle que celles qui, dès qu’on les sent nous transporte vers des souvenirs heureux et nous procure un fort sentiment de sécurité. La femme était incapable de dire combien de temps ils restèrent ainsi. S’il s’agissait de secondes, de minutes… Elle se désenlaça et jeta un nouveau ses yeux dans les siens. Avec un sourire elle lui dit tendrement :

- Tu ne sais pas à quel point tu m’as manqué. J’avais vraiment envie de faire quelque chose pour toi. De te rendre aussi heureux que tu le fais pour moi, avoua-t-elle avant de lui donner un nouveau bisou.

Elle lui tendit ensuite sa coupe de champagne avec un large sourire et l’entraîna par le col vers le canapé avec un clin d’œil amusé suivit d’un petit rire. Tous deux s’assirent alors et Elizabeth leva son verre, ne le quittant pas du regard un instant.

- A nous !

Elle entrechoqua leurs coupes puis but une gorgée de sa boisson alcoolisée. Pendant un instant, seul le bruit du crépitement du feu dans la cheminée régna dans la pièce alors que la quadragénaire admirait son mari. Tout était parfait. Comme elle l’avait espéré !

- Une autre surprise t’attend dans la cuisine. Mais te connaissant, je suis sûr que tu as deviné de quoi il s’agit !

Elle marqua une pause puis se décida à lui demander des nouvelles :

- Je sais que ce n’est pas l’instant propice pour parler boulot mais… Comment c’est passé ta semaine ? Tu avais l’air assez occupé !

Un accueil à la hauteur ?

La tendresse et l'attention dont faisait preuve son épouse le rendait presque tout timide. Il rougissait et ne put s'empêcher de laisser passer un petit rire lorsqu'elle lui affirma être encore plus amoureuse que lui. On aurait dit deux collégiens sans expérience qui se bécotait en profitant de l'absence de leurs parents. D'ailleurs, c'était peut-être pour cela que les choses marchaient terriblement bine entre eux: ils avaient su garder l'amour des premiers instants. Ils n'ont toujours fait que le nourrir et l'ont vu grandir. Évidemment, il y avait des disputes et la vie n'était pas toujours rose, mais la tempête s'était toujours calmée vite entre eux. Cette innocence et en même cette sensualité étaient contradictoires, mais c'est ce qui donnait le charme de ce brave couple. Wayne déposa un nouveau baiser contre les lèvres de sa belle lorsque celle-ci se blottit contre lui, ses deux verres à la main. Ils restèrent ainsi quelques instant, Wayne l'enlaçant et déposant un baiser cette fois-ci sur son front. Un baiser de bienveillance. Il la regarda intensément, les yeux empli d'amour avant qu'ils ne finissent par s'écarter un peu.

Il sourit face à la remarque de son interlocutrice. "Tu m'as beaucoup manqué aussi...." D'ailleurs, ils n'avaient pas cessé de s'échanger des messages, même si Wayne n'avait pas toujours répondu rapidement, étant pris dans de nombreuses réunions. "Tu sais que tu n'as rien à faire pour me rendre heureux si ce n'est d'être simplement présente... Tout ça c'est... c'est trop!" déclara-t-il tout en continuant d'avoir ce regard tendre. Ils étaient tellement mignons que ça en devenait presque exagéré. Mais que voulez-vous, à chaque retour de voyages d'affaires ou presque, ils se retrouvaient comme si cela faisait des années qu'ils étaient séparés. Une sincérité qui n'existe plus beaucoup de par nos jours.

Wayne se laissa entraîner vers le canapé une coupe de champagne à la main. Il devait avouer que s'asseoir lui fit un bien fou. C'était drôle, même quelques jours ailleurs rendaient l'impression d'être chez soi encore plus agréable à chaque retour. "A nous!" trinquèrent-ils un instant en entrehoquant leurs coupes.
"Ah oui, je crois bien avoir deviné!" déclara-t-il suite aux propos de son épouse. Et oui, l'odeur du saumon à l'oseille, il la connaissait par coeur, surtout celle du poisson préparé par Elizabeth. Elle avait une façon de faire ce plat qu'il adorait et personne ne parvenait à sa cheville de ce côté-là. Le quadragénenaire posa son verre sur la table basse, bien qu'il n'ait bu qu'une seule gorgée, tout en écoutant attentivement son interlocutrice. "Oh c'était assez sympa tout de même... On a même profité d'une après-midi pour visiter. Sinon, les réunions, comme d'habitude. Tu sais comment sont les clients, toujours à négocier les meilleurs prix...." Il rit légèrement. Ce n'était vraiment pas le moment pour parler boulot. Au contraire, c'était leur moment à eux. Il eut donc vite fait de changer de sujet. "Et toi alors? Comment ça s'est passé ici? Sky a été sage au moins? Car je vous ai rapporté des cadeaux à toutes les deux et je ne peux les donner qu'aux personnes sages et méritantes..." déclara-t-il malicieusement, ne décrochant pas son regard d'Elizabeth. Le terme "méritantes" pouvait porter à interprétation pour Eli' surtout avec le regard de son époux posé sur elle.
A vrai dire, Wayne avait été séduit par des peluches dans une vitrine. Enfin séduit... Disons qu'il avait pensé que les deux femmes de sa vie les aimeraient. Il en avait acheté une pour Sky et une... pour sa femme. Oui oui, il était le genre de mec à offrir des peluches à son épouse. Mais les fleurs... ça fanent, ça se transportent mal. Les peluches, c'est mignon et on peut dormir avec. Oui, oui, Wayne avait tout d'un gamin de temps en temps. Mais il avait aussi pensé à acheter un joli bracelet pour Elizabeth.... Qu'il lui donnerait plus tard avec le reste, rien ne pressait.

Un accueil à la hauteur ?

Il n’y avait aucun doute. Wayne et Elizabeth formaient un duo des plus rayonnants. Parfois, la jeune femme rêvassait qu’ils pourraient facilement faire de l’ombre aux couples les plus mythiques tels que Roméo et Juliette. Et ce soir n’était pas une exception à la règle. Il suffisait de scruter leurs regards pour y voir l’amour débordant à flot. Tous deux s’avouèrent qu’ils avaient ressenti un manque alors qu’ils avaient été éloignés l’un de l’autre pendant plusieurs jours. A sa remarque suivante, Elizabeth leva un sourcil et lui lança d’une voix pleine de malice :

- Oh et bien… Si vraiment tu trouves que j’en ai trop fait… Je connais plusieurs manières d’y remédier…

Elle descendit son regard au niveau de sa robe noire, et posa de nouveau ses yeux sur lui avec un air charmeur. La danseuse finit alors par éclater de rire. Cette dernière avait toujours trouvé cela marrant de taquiner Wayne sur ce sujet. Il n’était pas rare que celui-ci ne sache pas comment réagir. Ce qu’elle trouvait extrêmement mignon ! Elizabeth vint alors lui faire un nouveau câlin et murmura :

- Tu es vraiment adorable. Mais sache que pour toi… Rien ne sera jamais de trop.

Lorsque la mère de Caleb mit fin à leur étreinte, elle entraina son mari sur le canapé où ils s’installèrent confortablement. C’était tellement agréable de se retrouver tous les deux ! Dans la bonne humeur et dans une ambiance romantique qui plus est. Une fois parent, il n’était pas toujours simple de garder ces petits moments privilégiés. Entre-autre car il fallait réussir à faire garder les enfants, à surmonter la fatigue, prendre la peine de se pomponner, etc. Mais cela en valait la chandelle. Elizabeth se sentait parfaitement bien dans cette relation stable, seine et riche. Wayne y était pour beaucoup, parfois même malgré lui. Il avait un côté innocent des plus attendrissants. Même ses gaffes étaient charmantes ! Plus d’une fois la danseuse s’était amusée à le surnommer « mon nounours » comme monnaie d’échange pour un câlin. Très pratique d’ailleurs pour les jours de dispute ! Tous les deux trinquèrent et la conversation se poursuivit. Ainsi donc, comme elle l’avait soupçonné, Wayne avait connaissance de ce qui se tramait en cuisine.

- Après tout, quoi de mieux après un long voyage qu’un bon repas ? Je suis sûr que tu ne t’ai encore nourri que de hamburger et compagnie ! dit-elle avec, dans sa voix, une minuscule pointe de reproche bien qu’elle gardait un sourire sincère.

Ce n’était pas qu’Elizabeth n’aimait pas cela. De temps en temps c’était très agréable. Une bonne pizza en famille ! Mais pendant plusieurs jours d’affilés, cela lui faisait toujours craindre des problèmes de santé. Que voulez-vous ? En plus d’être maman-poule elle était femme-poule ! Son mari commença alors à lui faire le récit de sa semaine loin de la maison familiale. Parfois, elle se demandait comme Wayne arrivait à faire son métier. Voyager tout le temps tout en ayant la phobie des véhicules, devoir négocier sans cesse de l’argent avec des inconnus désagréables la plupart du temps…  Cela serait beaucoup trop de pression pour elle. Et pourtant, ce qui lui paraissait incroyable, était que son homme revenait toujours relativement décontracté. Plusieurs fois il lui était arrivé de se demander comment il se comportait au boulot. Était-il toujours aussi charmant qu’en privé ou pouvait-il être un véritable requin ? Cela serait étonnant mais pourtant il lui semblait qu’être patron nécessitait  forcément de la fermeté.

- Tu as encore dû te taper la tête contre les murs j’imagine…, répondit-elle avec compassion.

Wayne lui renvoya alors sa question. A son tour, elle déposa sa coupe de champagne sur la table basse et se montra très intriguée par le mot « cadeaux ». Elizabeth avait toujours adoré en recevoir et en donner. Peu lui importait le prix. Pour elle l’important était le geste. Cela signifiait qu’on pensait à la personne en question, et que lui donner du bonheur était plus important que tout. Le petit sous-entendu sur le terme « méritante » ne lui échappa pas et elle fut surprise par cette soudaine prise d’initiative. Ce n’était pas du tout déplaisant. Le regard que Wayne posait sur elle était ce qu’elle qualifierait de « flamboyant ». Son sourire s’étendit.

- Je suis obligée de te raconter ma semaine ou bien je peux passer directement à la partie où je te prouve que je suis EXTRÊMEMENT méritante ? Quoique cela risquerait de ne pas aller avec le mot « sage »… C’est très difficile de choisir…

Elle rigola et glissa ses doigts entre ceux de son mari avant de se pencher vers lui et de l’embrasser. Ce n’était pas le genre de baiser entreprenant, de telle sorte qu’y mettre un terme ne risquait pas de vexer l’un ou l’autre. La danseuse continua cet échange pendant un instant puis y mit fin lentement. Elizabeth se devait tout de même de le rassurer !

- Mais si tu veux tout savoir, il ne s’est rien passé de particulier. Sky va bien, et j’aurai plusieurs choses à t’annoncer quant à Caleb. De très bonnes nouvelles.

Même si elle avait parfaitement connaissance de la relation chaotique entre les deux hommes, Elizabeth était persuadée qu’il n’était pas totalement désintéressé par le bien-être du fils de sa femme. Le regard à nouveau plein de malice, elle dit d’une voix douce :

- J’ai le droit à mon cadeau maintenant ? Ou ce n’était pas suffisant ?

Un accueil à la hauteur ?

Wayne rougit face au regard insistant de son épouse. C'était fou qu'il était toujours intimidé lorsqu'il s'agissait d'intimité avec elle, même en ce temps, alors qu'ils étaient ensembles depuis tant d'années. Cela devait être dû à l'immense respect et amour qu'il avait pour elle. Il faillit cependant rétorquer quelque chose d'assez osé – faut dire que passer de nouveau du temps avec Joan l'avait un peu perverti – mais il préféra se taire et profiter du son cristallin du rire d'Elizabeth. Il l'embrassa à nouveau. Elle avait tord, c'était trop. Il avait tellement de chance de l'avoir pour femme, qu'elle l'accepte, lui et ses multiples défauts. Pour lui, elle n'en avait pas. Enfin si, mais ces défauts lui paraissaient invisibles. Il se pencha vers son oreille pour murmurer doucement: "J'aime tellement ton rire....".

Puis, les voilà sur le canapé à se regarder comme deux personnes amoureuses qui se découvrent. C'était l'effet des voyages d'affaires sur eux. Wayne avait trouvé le moyen de déléguer davantage les ventes et négociations. Ainsi il pourrait plus profiter de sa famille et être présent pour eux. Wayne avait déjà l'eau à la bouche en songeant au saumon qu'il allait déguster bientôt, mais ne put s'empêcher de rire devant la remarque de son interlocutrice. Il lui sourit ensuite en posant une main sur son ventre pour tâter sa propre graisse. Il n'en avait pas tellement, mais il avait soudainement l'impression qu'il ferait mieux de faire davantage d'efforts pour ne pas finir un jour par déplaire physiquement à Elizabeth. Après tout, elle était une danseuse... La forme physique, ça la connaissait. "Comment tu le sais? Ca se voit tant que ça que j'ai pris un peu de poids?" demanda-t-il en faisant apparaître une moue sur son visage. Il haussa ensuite les épaules en souriant à nouveau. Evidemment qu'elle ne voyait pas de différence... Quoi qu'en quelques jours de malbouffe, ça pouvait arriver. Mais tout de même, les repas avec les clients se faisaient dans de vrais restaurants avec une cuisine équilibrée et variée.

Puis vînt le moment de raconter sa semaine, Wayne fit la version courte. Il n'était pas nécessaire de casser ce moment romantique et de retrouvailles en parlant boulot. Il le faisait déjà bien assez en tant normal. Il sourit face à la nouvelle remarque de son épouse. Ils s'embrassèrent de nouveau, cette fois-ci de façon plus torride, avant de s'écarter et de se regarder dans les yeux. Il eut un petit sourire bien malicieux. "Je crois que tu auras tout le temps de me le prouver tout à l'heure...." indiqua-t-il en finissant par un petit clin d'oeil complice. Il savait qu'elle était méritante... Et ils avaient toute la nuit devant eux.
"Oh, ah oui?" délcara-t-il lorsque son épouse lui parla de Caleb. Wayne ne parvenait vraiment pas à faire la paix avec ce garçon. En même temps, ils ne s'étaient jamais vraiment entendus. Heureusement qu'Eli' n'avait pas trop fait attention à l'avis de son fils, sinon les deux quadragénenaires ne seraient pas mariés à présent. "Tu me diras tout ça plus tard alors..." continua-t-il sans grand enthousiasme. Cela ne le désintéressait pas, au contraire, il était heureux d'avoir des nouvelles de son beau-fils et il aimerait que les choes s'arrangent, mais ce ne serait pas simple. Mais pour le moment, il voulait simplement profiter de son épouse et non discuter des autres. A part de Sky évidemment.
Lorsqu'Elizabeth lui demanda si elle avait droit à son cadeau, il la regarda avec insistance quelques secondes avant de conclure: "Bon d'accord, on a dire que oui! Mais c'est juste parce que je t'aime trop pour te faire attendre!" Il rit et attira le sac de voyage qu'il avait laissé dans le coin du canapé en entrant. Il ouvrit la fermeture éclair et fouilla (dans le bordel, il n'avait rien plié pour le retour. Autant il faisait des efforts à l'aller question d'avoir des costumes en état, présentables, mais pour le retour, il s'en fichait). "Tadam!" s'exclama-t-il en sortant une petite boîte (comportant le bracelet) et la fameuse peluche emballée dans le papier cadeau de la boutique où il l'avait achetée.

Un accueil à la hauteur ?

Les deux amoureux ne se lassaient pas de se faire des compliments, rougissant l’un après l’autre. Lorsque Wayne l’informa qu’il aimait son rire, sa femme y répondit par une douce caresse sur sa joue. On apercevait déjà l’ombre d’un rasage datant de moins de vingt-quatre heures. C’était sûrement le détail le plus parlant quant à la maturité en âge du garçon. Sans celui-ci, il perdait un bon nombre d’années, ce qui correspondait donc tout à fait avec son côté grand-enfant. De toute manière, elle avait déniché le plus bel homme de la Terre. Elizabeth avait d’ailleurs toujours trouvé qu’il faisait plus jeune qu’elle, même lorsqu’ils avaient commencé à sortir ensemble. Réalité ou tout dans la tête ? Bonne question !

Une fois sur le canapé, tous les deux continuèrent la conversation. Alors qu’ils parlaient alimentation, Wayne se mit à chercher ses propres poignées d’amour pour jauger s’il avait pris du poids à cause de la malbouffe. Le voyant faire le pitre, la danseuse ne put s’empêcher de rigoler avec lui. Sa petite moue la fit fondre instantanément, se maudissant d’être parfois aussi faible. Pour le taquiner, elle posa à nouveau sa main droite sur le visage de son interlocuteur et saisit délicatement sa joue pour vérifier si celle-ci avait pris en volume. Dans un premier temps, elle prit un air choqué et scandalisé pour tenter de déstabiliser Wayne, puis elle éclata de rire à nouveau.

- Non ! Rien à signaler ! Toujours la même bouille parfaite… avoua-t-elle tout en glissant cette même-main dans les cheveux de son mari.

Jamais elle ne se lasserait d’employer le terme « bouille » pour parler du visage de Wayne. Même sur les photos de son enfance il l’avait déjà ! C’était incroyable comme il avait relativement peu changé. Il était seulement devenu… Séduisant et sexy. Personne ne pouvait le nier ! Du moins d’après elle. Ce qui, en y réfléchissant, pouvait poser problème. Heureusement, l’homme ne lui avait jamais donné une quelconque raison de douter de sa fidélité. Et si une femme osait lui faisait du rentre-dedans, cette dernière ne tarderait pas à savoir qu’il était marié. Un œil au boer noir serait là pour le lui rappeler pendant un bon mois. Elizabeth n’avait jamais été une grande violente, mais il s’agissait sûrement d’un des quelques cas exceptionnels où elle n’hésiterait pas à montrer de quel bois elle se chauffait.

Quelques instants plus tard, la chaleur de la pièce monta d’un cran. Même Wayne y mettait du sien avec sa phrase pleine de sous-entendu et son clin d’œil irrésistible. C’est décidé, je mettrais ce genre de robes beaucoup plus souvent ! pensa-t-elle en remarquant l’état de douce excitation de son mari. La mère de Caleb lui confia ensuite les dernières nouveautés de la semaine, en indiquant qu’elle donnerait les détails plus tard. C’était leur soirée. Rien qu’à eux. Et personne ne pourrait les en priver. Même si la réponse de son interlocuteur était peu enthousiaste, Elizabeth savait pertinemment qu’il était heureux pour son fils. Mais sa joie très limitée était due à leur éternelle chamaillerie dont elle ne connaissait même pas les raisons. A un moment donné, la danseuse avait eu peur d’être amené à faire un choix entre Wayne et Caleb. Heureusement, la situation n’avait au final jamais été aussi radicale.

Tous les deux rigolèrent quand Wayne décida de lui donner son cadeau, et Elizabeth frappa dans ses mains pour marquer son excitation. Venant de son mari, la femme se préparait à toutes les possibilités. Des gadgets électroniques un peu étranges, jusqu’aux voyages à l’autre bout du monde.  Elle le regarda alors attirer son sac vers lui pour en retirer non pas un, mais deux objets. Une superbe boîte contenant probablement un bijou, et le second d’une forme plutôt difforme, emballé dans du papier cadeau violet où étaient imprimés des personnages de cartoons comme Titi et compagnie. La personnalité de Wayne était parfaitement représentée ! La blonde laissa échapper un petit rire amusé, posant son regard sur son mari d’un air signifiant « Tu es vraiment trop mignon toi ! ». Par lequel allait-elle commencer ? Par le plus mystérieux ! Elizabeth saisit donc délicatement le deuxième cadeau. Il était léger. Mais impossible de définir la texture. Peu importe ce qui s’y cachait à l’intérieur, la surprise devait être rangée dans une boîte en plastique, même si celle-ci devait suivre la forme de son contenu. Elle retira habillement le papier cadeau pour découvrir une magnifique peluche. Sûrement la plus belle qu’elle n’avait jamais vu. Il ne lui fallut pas plus d’un instant pour comprendre ce qui avait motivé Wayne à acheter cette dernière. Il s’agissait d’un nounours, comme elle surnommait souvent son acheteur, avec de magnifiques yeux bleus étrangement similaires à ceux de Wayne. Elizabeth s’empressa de le sortir de sa prison de plastique pour le regarder de plus près, tout en comparant la peluche à son homme.

- Il est vraiment sublime… confia-t-elle, une larme à l’œil. Merci beaucoup mon ‘Nours.

La danseuse se pencha vers lui pour lui déposer un baiser, se serrant contre lui avec la peluche entre eux. Ils se désenlacèrent et Elizabeth posa la peluche sur ses genoux, tout en lui ordonnant de rester tranquille à voix haute. Il lui restait le deuxième cadeau mystère de son mari ! Elle prit alors la boîte et lança, amusée :

- Au moins je sais que ce n’est pas une bague de fiançailles….

Pourquoi ? Tout simplement car ils étaient déjà marié, et qu’en plus la situation actuelle se prêtait bien trop à ce genre de demande pour que Wayne en profite ! Juste avant d’ouvrir la boîte, la quadragénaire pensa au jour où il lui avait fait sa demande. Elle sortait de la douche, une serviette autour de la taille et sur la tête. Lorsqu’elle avait ouvert la porte de la salle de bain et l’avait vu à genoux, Elizabeth avait failli laisser tomber sa serviette. Ce qui, entre nous, n’aurait pas forcément déplu au garçon. Bref, la danseuse ouvrit l’écrin et y vit un bracelet resplendissant qui avait probablement coûté une petite fortune. L’ironie du sort voulait qu’il aille parfaitement avec ce qu’elle portait actuellement !

- Il est parfait ! s’exclama-t-elle tout en le glissant à son poignet gauche. - Je ne sais comment te remercier à part en te répétant toute notre vie à quel point tu es parfait et que je t’aime!

Elizabeth revint lui déposer un long baiser sur les lèvres. Alors qu’elle posait sa main gauche sur les abdominaux de son mari, un petit son aigue retentit non loin de là, la sortant de leurs ébats. Le plat état prêt ! Si elle pouvait éviter de tout faire brûler ce serait parfait ! La femme se leva alors, tenant toujours la peluche contre elle.

- Je reviens. Le plat est prêt. Si vous voulez bien vous mettre à table Monsieur Hester… dit-elle d’une voix légèrement aguicheuse. Il leur arrivait parfois de s’appeler « Madame » et « Monsieur ». C’était un jeu qu’elle trouvait amusant. - Si vous le permettez, je garde ce cher… Wywy avec moi. Il va m’aider en cuisine.

Elle fit un clin d’œil à son mari puis se dirigea en hâte dans la pièce voisine pour finir de préparer le repas.

Un accueil à la hauteur ?

Ce qui était net dans la relation entre Wayne et Elizabeth c'était que la quadragénaire était de temps en temps une vraie femme-mère. Elle aimait couver son mari en toutes circonstances. En même temps, malgré son âge mûr, il avait gardé sa candeur et une énorme partie d'enfance. On le voyait parfois comme un gamin enfermé dans un corps d'adulte. Mais attention, ce n'était pas pour cela qu'il n'était pas quelqu'un de responsable. Au contraire. Il avait réussi à montrer sa propre boîte jusqu'à ce qu'elle atteigne un certain sommet et à gérer sa vie de famille.  C'était un homme fort sympathique, mais il lui arrivait d'être autoritaire, parfois même trop sévère. Sky n'allait pas le démentir, la petite avait souvent eu affaire à la colère de son père. C'était sans doute aussi ce point de sa personnalité qui avait cassé la relation qu'il aurait pu entretenir avec son beau-fils. Il avait été trop strict en ce qui concernait son avenir...

Elizabeth, après s'être amusé à l'effrayer finit par lui affirmer que la malbouffe n'avait pas encore eu raison de son corps. Il sourit. C'était bête, peut-être même complètement débile, mais le brave homme avait un peu stressé à l'idée que son épouse lui dise qu'il avait grossi. Car si c'était le cas, il savait que ce serait sincère et qu'il lui plairait moins, de ce fait. Enfin... C'était ainsi qu'il voyait les choses. Pourtant, lui, il n'en avait que faire du physique... De toute façon, il passait tellement de temps sur son vélo ou ses rollers qu'il était impossible qu'il grossisse facilement. En effet, sa peur des véhicules l'empêchait de rentrer à la maison en voiture comme la plupart des gens. D'ailleurs, Elizabeth s'inquiétait souvent de le voir prendre son vélo pour passer les grandes rues et sortir de la ville... Surtout depuis la fois où il s'était fait renversé et était tombé dans un fossé. Plus de peur que de mal ce jour-là et heureusement... D'ailleurs la responsable était Joan et c'était ainsi qu'ils avaient renoué contact. Drôle d'aventure non?

Ce fut fièrement que Wayne sortit les cadeaux à l'attention de son épouse, espérant qu'ils lui plairait vraiment. Il n'avait pas tant de doutes que cela, mais tout de même. C'était tellement plaisant de faire plaisir qu'il n'attendait que cela. Il la regarda déballer le premier cadeau: la peluche, anxieux et pressé de voir sa réaction, comme si c'était lui qui était en train de déballer un cadeau. Lorsqu'elle fit mine de le comparer à lui, plaçant le fameux nounours près de lui, il ne put s'empêcher de rire. "De rien, mon coeur..." murmura-t-il lorsqu'elle le remercia. Lorsque la danseuse se plaça tout contre lui, il l'enlaça de ses bras et déposa un petit baiser sur son front. "Je suis tellement heureux quand tu es là... Tu ne peux pas savoir à quel point..." dit-il en profitant de l'instant présent, avant que les enlaçades ne prennent fin.  Elle enfila le bracelet, qui lui allait à merveille! Des cadeaux bien réussis! Il décida que c'était le bon moment pour lui annoncer que, même s'il passerait encore de nombreux soirées au bureau jusque tard dans la nuit, il n'aurait plus tant de voyages d'affaires à faire. Au moins, il ne passerait pas ses nuits ailleurs. "Tu sais, j'ai décidé de déléguer les négociations et les visites clients... Alors fini les jours loin de la maison avant un certain temps." Il sourit sereinement. C'était mieux ainsi. Et c'était exactement le bon moment pour l'annoncer. D'ailleurs, c'était étonant qu'il y ait pensé à présent... Il aurait pu le dire en le criant des toilettes ou ... en allant au travail le matin. Enfin bref.

Un petit bruit calma leurs étreintes et leurs baisers. C'était le four. Le repas était prêt. Wayne rit quand sa femme lui annonça le nom de sa peluche. C'était adorable, mais il n'en attendait pas moins d'elle."Mais je reste quand même ton nounours préféré hein?" lança-t-il tout de même en continuant de rire. Bah oui, il n'avait pas fait ce petit présent pour qu'il lui prenne sa place! "Très bien Madame Hester, je suis à vos ordres!" déclara-t-il en se levant du canapé. C'était amusant comment ils mélangeaient les styles: tantôt gamin, tantôt adultes, tantôt très coquasses. Il faut dire que dans leur lit, lorsqu'ils étaient dans l'intimité la plus complète, ils n'avaient rien de deux enfants...
Wayne se dirigea vers la salle de bains pour se laver les mains. Il en profita pour enlever son pull et rester en t-shirt.

En se regardant dans le miroir, il songea à la fameuse journée passée à la fête foraine et aux baisers échangés avec Joan. C'était étrange qu'il y pense à ce moment et pourtant ce fut le cas. Aucune idée de ce qui avait pu lui mettre cette pensée en tête, mais elle était là, bien présente, et un peu gênante. Autant ce jour-là il avait trouvé cela normal et juste un jeu un peu idiot, autant depuis quelques temps, il se demandait s'il ne devrait pas en tirer un mot à Eli... Car ce n'était pas bien honnête. Il avait l'impression d'avoir fait quelque chose de mal et d'avoir un truc à se reprocher. Sans doute parce qu'il n'en avait rien dit à son épouse.. Elle ne savait même pas qu'il était allé à la fête foraine. Pour elle, il avait bossé tout le week-end entre quatre murs.

Revenant dans le salon, les mains propres et à son aise, il s'installa à sa place et tira un large sourire lorsqu'Eli' sortit de la cuisine, le plat dans les mains. Il ne s'était pas trompé sur la nature du met: saumon à l'oseille.
"Hum ça a l'air délicieux!" affirma-t-il en y lançant un oeil, tout en gardant à l'esprit le malaise qu'il venait de ressentir.

Un accueil à la hauteur ?

Elizabeth déballait ses cadeaux avec une excitation qu’elle avait bien du mal à contrôler. Il lui arrivait de ne pas vouloir faire les choses proprement, et de seulement déchirer le papier à la façon barbare pour délivrer l’objet de cet emballage. Cependant, vu le cadre de cette soirée, la danseuse voulait faire les choses avec tout de même au moins un minimum de bonnes manières. La peluche était tout simplement parfaite. Cela la touchait énormément. Certains pourraient trouver cela stupide, mais pour elle c’était comme si son mari lui disait qu’ainsi elle ne serait jamais seule, même lors de ses déplacements. Il serait toujours près d’elle. Malgré sa forme miniature ! Beaucoup de femmes de son âge se seraient sûrement montrées déçues de ce type de cadeau, voir même auraient-elles rit au nez de leur compagnon. Mais c’était très loin d’être son cas. La simplicité au premier regard cachait parfois une profondeur sentimentale bien plus prononcée qu’un objet de la valeur de la Tour Eiffel. Qui plus est, cela ne donnait pas l’impression d’être « achetée ». Quelques instants plus tard, elle était blottie dans ses bras, Wayne lui susurrant à quel point il se sentait heureux en sa présence. La femme lui jeta un regard qui signifiait « Et c’est complètement réciproque ». Tout était parfait. Lorsqu’elle découvrit le second cadeau, Elizabeth se dit qu’elle aurait dû vraiment en faire encore plus quant à la surprise qu’elle lui avait réservée ce soir. Même si le PDG lui avait confié que c’était déjà trop, ses présents avaient une telle valeur sentimentale ! Se décidant à ne pas rentrer dans ce qui se terminerait par être une compétition stupide, elle mit tout cela de côté et décida de profiter du moment présent. Cela ne servait à rien de compter les points de toute manière. Juste à se mettre énormément de pression. Le plus important était que, même éloignés l’un de l’autre, ils ne s’oubliaient pas.

Alors qu’il lui semblait que les surprises étaient terminées pour de bon, Wayne lui fit une révélation qu’il la laissa bouche-bée. Ainsi donc il comptait délaisser certaines tâches pour se consacrer davantage à sa vie de famille ? Elle n’arrivait pas à y croire ! Avait-il quelque chose à se faire pardonner ? En tous les cas, Elizabeth laissa poussa un petit cri de joie et lui sauta dans les bras. Enfin ils pourraient passer plus de temps ensemble ! Sky serait tellement heureuse de ne plus dire au revoir à son papa tous les deux ou trois jours en moyenne ! La danseuse serra son mari fort contre elle et s’amusa à lui faire plein de bisous très rapides dans son cou et sur son visage, pour terminer son parcours sur ses lèvres.

- Je n’arrive pas à y croire ! Moi qui pensais que tu détestais laisser les autres gérer les affaires de la boite. Que tu aimais garder ce genre de contrôle ! Ça faisait longtemps que tu y pensais ? Qu’est-ce qui t’a poussé à faire ça ? lui demanda-t-elle d’une voix légèrement hystérique. Puis elle fit les yeux ronds et une ombre passa sur son visage.  Oh non ! Tu as un problème de santé ?

Elizabeth était en train de paniquer. Après tout on n’était jamais trop prudent ! Son interlocuteur avait toujours refusé de lâcher prise sur certaines tâches. Et voilà qu’enfin il changeait d’avis. Pourquoi ? Bien que la réponse « pour être avec sa famille » fût des plus évidentes, elle ne pouvait s’empêcher de se faire du souci.

Une fois rassurée, ils revinrent aux baisers. Qui furent interrompu par le bruit du four. La femme laissa échapper un grognement de mécontentement avant de se séparer de son mari pour se lever. Armée de son fidèle Wywy dont elle révéla le prénom, Elizabeth commençait à s’avancer vers la cuisine lorsque son mari prit la parole, lui demandant s’il était toujours son nounours favori. Il annonça également qu’il était à ses ordres. La danseuse leva un sourcil pour lui lancer un regard charmeur.

- Tout dépend de la bonne volonté que vous mettez à m’obéir très cher…

Elle lui fit un clin d’œil puis s’éclipsa dans la partie voisine après avoir pris les assiettes de leur service de mariage. La mère de Caleb posa Wywy sur une chaise pour regarder comment était le fondant au chocolat qui était dans le four. Piquant avec un couteau, Elizabeth conclu qu’il était prêt. Elle le sorti donc du four et le couvrit de telle sorte qu’il ne refroidisse pas trop, sans pour autant s’assécher. L’odeur du gâteau allait-elle enfin prendre le dessus sur celle du repas ? Au moins tout était prêt. Imaginez si elle avait dû passer un quart d’heure dans la cuisine pour faire le dessert, attendre le temps de la cuisson etc ! Elle avait dû se montrer assez créative pour que le plat principal ne refroidisse pas. Pendant un moment elle s’était demandé comment garder le repas au chaud sans pour autant devoir le réaliser une minute avant consommation. Le thermos s’était révélé le seul moyen ! En particulier pour la sauce à l’oseille. Bref, passons ces petits détails techniques. Lorsqu’elle rassembla les pavés de saumon, les tagliatelles et la sauce, tout était parfait. De toute manière, cela ne faisait qu’une heure. Et encore !

Elizabeth fit beaucoup d’effort sur la présentation comme à son habitude. S’apprêtant à venir servir son mari, elle s’assura qu’elle n’avait pas tâché sa robe. Nickel. Radieuse, elle débarqua enfin dans le coin salle à manger pour déposer les assiettes sur la table, servant Wayne en premier bien évidemment. La danseuse fit un large sourire à l’exclamation de son mari. Elle se souvint alors des deux coupes de champagnes qui trônaient encore sur la table basse. Elle fit signe de s’éclipser comme par magie tout en rigolant, puis revint avec ces dernières qu’elle déposa devant eux. Deux autres duos étaient de sortie. Un pour l’eau, et un pour le vin. Au moins ils avaient le choix ! Wywy était resté dans la cuisine, mais de toute manière ils ne pouvaient pas le mettre à table avec eux ! En espérant qu’il ne mange pas le dessert ! pensa-t-elle amusée.

- C’était bien ce à quoi tu t’attendais j’imagine ? L’odeur ne trompe pas ! J’ai préparé tout ça juste avant que tu arrives. Bien sûr, j’ai dû utiliser mes pouvoirs pour les maintenir au chaud ! révéla-t-elle avant de prendre un air mystérieux.  J’espère que c’est bon. Tu me connais. Toujours peur de m’être loupé !

Elle leva les yeux au ciel contre elle-même puis les rabaissa sur son mari. Elizabeth remarqua alors qu’il avait ôté son pull. Elle pouffa de rire quant à ce qui lui était passé par l’esprit et lui lança :

- Je vois que tu as commencé sans moi ! Tu pourrais au moins attendre le dessert !

La danseuse se releva pour lui faire un dernier bisou puis lui adressa un « Bon appétit ! » avant de commencer à déguster son plat. Chaud, les ingrédients bien dosés avec les fameuses deux cuillères à soupe de vin blanc sec, etc. C’était une victoire culinaire. Bien sûr les grands chefs cuisiniers y verraient sûrement des reproches à y faire mais bon. Ce n’était pas le contexte ! Quand était-il du côté de Wayne ? Elle préférait ne pas demander, cela ferait trop « je cherche à m’attirer des compliments ». Et puis, après tout, peut-être que ses attentes n’étaient pas les mêmes que les siennes !

Quelque chose semblait tracasser son mari. Elle fronça les sourcils, plutôt étonnée.

- Que se passe-t-il ? Tu n’aimes pas ?

Un accueil à la hauteur ?

Wayne fut surpris par l'attaque de baisers qu'il dût subir suite à son annonce joviale. Mais ce ne fut pas pour lui déplaire. D'ailleurs, il se félicita d'avoir décidé de le lui dire dès à présent. Il avait hâte que Sky soit au courant que son papa serait bien plus souvent à la maison. La fillette avait des réactions si émotives! Le quadragénaire hocha la tête face aux questionnements de son épouse qui paraissait très étonnée de son choix. Il était vrai qu'avec son ami et co-fondateur de l'entreprise, ils avaient toujours aimé s'occuper eux-même de la plupart des tâches, surtout lorsqu'elles concernaient la communication. Mais ils savaient tous deux qu'ils se faisaient vieux et avaient tous les deux une famille, alors... Il fallait profiter un peu de tout cela et non se tuer au boulot. Il était sur le point de répondre à son interlocutrice lorsqu'elle posa une question qui lui fit afficher une moue d'étonnement.
"Quoi?" demanda-t-il interloqué. "Non pas du tout! Ne t'inquiètes pas, je vais bien!" Sous l'oeil inquisiteur de son épouse, il sourit tendrement avant de rajouter: "Je te jure." Oui, il le jurait et la plupart du temps, il disait la vérité. Disons dans 80 pourcent des cas. Lorsqu'Elizabeth fut rassurée, leurs câlins reprirent. Pour Wayne, avoir Eli dans ses bras représentait un véritable baume pour le coeur. Cependant cette extrême tendresse fut coupée net par un bruit dans la cuisine, qui indiquait qu'il était temps de se mettre à table.
Après s'être lavé les mains et avoir ôté son pull dans l'optique d'avoir moins chaud, il s'installa à table, jouant avec son verre, entre ses doigts. Ses pensées étaient occupées par ... Bah par Joan. La douceur de sa femme et son enthousiasme à la voir rentrer avaient remis sur le plateau l'histoire de ce baiser. Pourtant, cela n'avait été qu'un jeu, un jeu idiot, il n'y avait pas à s'en vouloir non? Certes, Wayne était assez cru dans ses propos avec Joan, mais il en avait toujours été ainsi par le passé, c'était leur façon d'être amis, n'est-ce pas? Pourtant quelque chose lui disait que c'était mal, qu'il n'avait pas été très honnête avec Elizabeth et qu'il lui devait la vérité. Il la lui devait car il l'aimait. Il l'aimait plus que tout et la respectait énormément.
Lorsque la danseuse réapparut dans la pièce, Wayne lui offrit un sourire peu serein, avant de se concentrer sur la nourriture. Ce n'était pas le moment de tout gâcher, non? Ils étaient bien là, tous les deux... Pourquoi rompre cette quiétude avec quelque chose qui n'était même pas un problème... Mais plus il y songeait, plus le PDG de LifeIsSmile avait du mal à se calmer et à raisonner normalement. Il fallait juste qu'il chasse toute pensée négative pour en revenir à la situation présente. Il trouverait un autre moment pour tout dire. De toute façon, il était certain qu'Eli ne lui en voudrait pas... Elle rirait. Oui, oui, elle en rirait.
Il fut sorti de ses pensées par la douce voix cristalline de son épouse. Son regard se posa sur elle et il lui sourit tout bonnement, tout en continuant à jouer avec son verre, le faisant glisser entre ses doigts par nervosité. "Ne t'en fais pas, je suis certain que c'est délicieux. Tu es un véritable chef!"déclara-t-il pour la rassurer. Il rit ensuite à sa remarque. Il avait commencé sans elle... Il lui avait fallu quelques secondes pour comprendre, mais dès que ce fut le cas, il rougit instantanément avant de cependant oser affirmer: "Ah parce que ce n'est pas moi le dessert?" Il rit délicatement, avant de planter sa fourchette dans le plat qu'on venait de lui servir. Il avala une bouchée et se mit à jouer avec sa fourchette, tout en machant. A première vue, il était calme, mais en vérité, l'histoire de la fête foraine le tracassait encore et encore. Et ce fait ne manqua pas d'être remarqué par Elizabeth qui aussitôt s'inquiéta. Il poussa un léger soupir. "Non, tout va bien, c'est délicieux..." déclara-t-il avant de relever le regard. Mais lorsqu'il croisa celui de sa chère et tendre, il eut un petit pincement au coeur. Dire la vérité lui brûlait les lèvres. Wayne fonctionnait comme cela: autant il pouvait garder quelque chose pour lui sans soucis pendant des jours et finalement ressentir le besoin de libérer sa pensée dans un moment parfois inapproprié. C'était d'ailleurs ainsi que cela s'était passé pour sa demande en mariage, il avait choisi le seul instant où il avait vraiment le courage de la faire. "En fait... J'ai un truc à te dire." finit-il par affirmer avant d'attraper une deuxième bouchée. Ca y est, il ne pouvait plus y échapper.