Un vieux t-shirt, une salopette en jeans dont une bretelle s’était décrochée et pendait dans le vide, ainsi qu’une casquette que j’avais tourné à l’envers. Voici la panoplie du parfait peintre, parce que sans compter que mes vêtements étaient couverts de fines gouttelettes par millier. Ça avait tout son charme, mais après je n’étais pas là non plus pour me transformer en stripteaseur pour ma meilleure amie. Là n’était pas le but de cette tenue. De toute manière, jamais elle n’aurait voulu de moi en tant que danseur. Donc n’allez pas croire que la bretelle c’est elle qui me l’a retiré sauvagement dans l’espoir de me voir en tenue d’Adam, c’est simplement l’attache qui se ferme mal et finissais par me gêner. Pinceau entre les mains, je m’essuyais le front du revers de la main, tournant mon visage vers la future maman. « D’accord, attention sous l’eau ne faudrait pas que tu deviennes toute ridée ! » Répliquais-je en guise de réponse, échappant le pinceau que je tenais dans ma main et qui vint dessiner une trace taupe sur ma joue. « Fudge. » Autant me pratiquer pour éviter les gros mots devant ce bébé. J’essuyais du revers de ma main la peinture, m’en étalant un peu sur la salopette. Je ne pouvais décidément pas avoir l’élégance d’un grand peintre, non j’allais simplement finir comme une toile de Picasso ou Pollock, au choix. Je continuais le découpage des murs laissant la moulure blanche. Mon travail était loin d’être achevé, mais je lui avais promis de le faire. C’est seulement que je n’avais pas pu avant, trop occupé avec le boulot au club, mais aussi pour un petit contrat avec un film indépendant. Mais chose promise, chose dut ! Je comptais bien finir cette chambre, même si j’y passais la nuit ! Déterminé. Voilà ce que j’étais, même si pour être franc je ne savais pas trop si j’allais rester en vie. Pour le moment, j’avais fini deux murs sur quatre, ce n’était pas si mal, même si ma superviseuse de chantier était partie sous la douche. Prendre confiance en moi ! Je suis grand… Ouais en y réfléchissant, c’était peut-être un soucis, grand et maladroit… Dans une idée de génie, je me disais que ça irait plus vite en faisant le découpage des murs restants, mais je n’avais pas mis le papier collant pour le découpage. L’horreur, en moins de deux je livrais un duel avec celui-ci. Entortillé, les doigts collés, le pied sur le ruban, alors que celui-ci passait dans mon dos et par-dessus ma tête. En gros, un rouleau de scotch avait le dessus sur moi, ce n’était pas une chose dont j’allais me vanter aussi aisément. « Pas encore. » Mais presque, avais-je envie d’ajouter, alors que je me tortillais dans tous les sens pour arriver à vaincre ce ruban autocollant. Quelle cruelle invention ! Je parviens à retirer le scotch, le mettant en boule. En fait, c’était tenace ce truc, restant coller à mes doigts alors que je secouais les mains dans tous les sens. Je l’entendais rigoler, tournant mon regard vers ma meilleure amie. « Moque-toi ! » Mon combat semblait peine perdu, lorsque le ruban quitta mes mains pour se retrouver sur le sol. Soulagé. Je reportais mon attention sur la brunette, haussant un sourcil. « Oui ? Tu as ? » Elle ne finissait pas sa phrase, ce qui m’inquiétait aussitôt. Mon regard se posant sur ce qu’elle semblait regarder. Elle venait de faire pipi ? Oui bon… sans commentaire. C’est à ce moment précis que tout parent devait ressentir l’appréhension d’avoir prochainement leur enfant, moi je sentais plutôt la panique et l’hyperventilation me prendre aux tripes. Je relevais mon regard vers le visage de ma meilleure amie, déglutissant lorsqu’elle annonçait qu’on avait un problème. Ce n’est jamais le genre de phrase qu’on rêve d’entendre et cela qu’importe le moment de sa vie. « Quoi ! » Même si je le présentais, l’entendre dire que le bébé arrivait me mis encore plus la panique. Si elle voulait me faire avoir une attaque, elle était bien partie ! Au moins, je savais qu’elle ne me faisait pas un poisson d’avril, puisque la date était passé. Et si c’était le cas, elle allait m’entendre ! On ne plaisante pas avec cela ! Mais en la regardant bien, je voyais que ce n’était pas une plaisanterie. Grimaçant, je me passais les mains sur la nuque. Je n’étais pas préparé, je ne savais même pas ce que je devais faire. Les cours prénataux ne valent rien ! Je déposais en premier lieu le pinceau dans le pot de peinture. En l’entendant, je sursautais. Que devais-je faire ! J’étais un peu trop dans mes pensées, répétant à demi voix ce qu’elle venait de me dire, je me dirigeais vers le placard, ouvrant à la volée les portes et prenait ledit sac. Balançant celui-ci sur mon épaule, je me dirigeais vers Avery pour l’aider. Je n’avais pas le choix de prendre sa voiture, me voyant assez mal aller à l’hôpital sur mon skate. Une planche n’était pas un lieu digne pour accoucher ! « On verra ça après ! Pour le moment, on doit juste arriver à l’hôpital en un seul morceau. Et pitié n’accouche pas dans la voiture ! » Je mettais le contact, prenant à toute vitesse le chemin vers l’hôpital. Une fois sur les lieux, je me tournais vers la brunette. « Reste-là, je reviens avec un fauteuil. » Hors de question de la laisser marcher. Je quittais la voiture que j’avais garé dans le parking, me précipitant vers l’entré pour prendre un fauteuil roulant avant de revenir. Je lui ouvrais la portière et l’aidait à prendre place, avant de récupérer le sac sur la banquette arrière et me mettre à courir tout en la poussant jusqu’à l’hôpital. « S’il-vous-plaît, elle va accoucher ! » Il suffisait de ces trois petits mots pour qu’une horde d’infirmière se précipite vers nous. Je ne prenais même pas le temps d’écouter leur question, cherchant seulement mon souffle. « Vous êtes le père ? » Relevant la tête, je voyais une infirmière me regarder. « Non… » Elle acquiesça d’un signe de la tête et j’en perdais encore plus mes mots. Non, je n’étais pas le père et je ne perdais mes moyens à cet instant même. « Avery tu veux que j’appelle quelqu’un ? » C’était tout ce que je trouvais à dire, alors que j’ignorais si je pourrais l’accompagner dans la salle d’accouchement.