Les chroniques d'une rêveuse : Partie I

“Arrête ! Rends le moi ! RENDS LE MOI !” Le ton de Megara se fit tout à coup tranchant mais il n'y avait rien à faire Josh ne l'entendait pas de cette oreille. “Ben t'as cas venir le reprendre ! Mauviette !” Les deux commencèrent à jouer au chat et à la souris et la maison fut rapidement, et comme d'habitude, rempli de cris et d'insultes. Pour ma part, je n'accordais aucune attention à ce remue-ménage. L'habitude sans aucun doute. Mais c'était surtout parce que j'étais plongée dans les aventures d'Hercule Poirot que le fracas de mes aînés ne m'affectait pas. J'avais fêté mes dix ans hier et tout ce qu'il me restait c'était de super souvenirs, un bout de gâteau que j'avais pris soin de mettre à l'abri des assauts impitoyables du ventre de mon frère et mon seul et unique cadeau offert conjointement par Josh et Meg : un livre d'Agatha Christie. J'étais ravie et cet anniversaire était sans aucun doute le meilleur jusqu'à présent. Soudain la voix de notre mère s'éleva par dessus le brouhaha. “ÇA SUFFIT ! ” Je relevais la tête. Meg et Josh s'étaient arrêtés, cela faisait plusieurs mois qu'on la voyait plonger dans une léthargie, indifférente à ce qui pouvait bien se passer sous son toit, plus captivée par ses feuilletons que par le souci de ses enfants. Je m'inquiétais, bien sûr mais, ce n'était pas comme si elle nous accordait beaucoup d'attention non plus avant. “Hé Souchi ! Qu'est-ce que tu fais dans ton coin ?” Josh venait de s'asseoir à côté de moi, collant, beaucoup trop collant. “Lâche-la gros balourd ! J'ai payé la moitié de ce bouquin autant que ce soit rentable !” “Ah ben ça...faut bien qu'y en ai une qui ait de la matière grise, hein !” Mon frère explosa de rire à ma remarque. Le coussin vola et vint s'écraser sur le visage de mon frère. Il se cogna la tête contre le mur, grimaça et se frotta l'arrière de la tête. Je me mis à rire, puis ma soeur s'y mit aussi et finalement nous éclatâmes de rire tous les trois.


Les chroniques d'une pleureuse : Partie II

“Qu'est-ce que vous faîtes là ? C'est mon spot ! Dégagez !” Le graffeur un peu trop territorial s'avança prêt à défendre ce qu'il pensait être son territoire. Je pris quelques secondes, le temps d'examiner un peu les qualités artistiques de mon opposant. “Ton spot ? Tu appelles ça un talent ? Tu graffes comme un maternelle, apprends déjà à tenir un crayon et après on verra si tu peux venir jouer dans la cours des grands.” Ma réplique avait claqué mais il n'entendait pas laisser son égo ainsi mis à mal par une fille. Il fit un pas en avant sur le pied de guerre mais mon garde du corps s'interposa. “Casses-toi !” La carrure de mon meilleur ami fit le reste. Je déposais mon sac à dos sur le sol et sortis mes bombes ainsi que mon croquis. “Franchement qu'est-ce que tu ferais sans moi ?” me taquina mon meilleur ami. Je souris et commençais à peindre. Quatre heures ne furent pas de trop pour terminer mon dessin. Je finiolais par Spero, ma signature. Après le dur labeur, la récompense : une soirée nous attendait. C'était le milieu de l'après-midi lorsque je pris le bus pour rentrer chez moi, encore bulleuse. Comme souvent, la fête avait continué chez quelqu'un jusqu'au petit jour puis petit à petit, la fatigue avait terrassé tout le monde. L'excès d'alcool et de drogue aussi d'ailleurs. Je mis mes écouteurs et me laissais emportée par la musique. Bien décidée à m'écrouler sur mon lit pour le reste de la journée et certainement la totalité de la nuit, je pris quand même la précaution de me prendre un verre d'eau. Règle de survie numéro 1 quand on aimait faire la fête jusqu'au bout de la nuit. Meg et Josh n'était pas à la maison, rien d'anormal : c'était le weekend. Par automatisme je jetais un coup d'oeil du côté du salon. Pas de Tv, je fronçais les sourcils. “M'man ?” appelais-je. “M'man, je suis de retour.” A vrai dire je n'attendais pas de réponse particulière. “Ta dévergondée et alcoolisée de fille est revenue ! Maman, tu pourrais au moins avoir la décence de...”Je me dirigeais vers sa chambre et j'entendis un cri. Le mien. Je m'effondrais.

Les chroniques d'une peureuse : Partie III

“Et Sugar Pie ! Ça fait un moment qu'on t'a pas vu.” La musique couvrait presque ses paroles. De toutes les possibilités que j'aurais pu avoir, j'avais choisi celle-là. Pourquoi ? Émotionnellement surchargé, mon cerveau ne prit pas vraiment la peine de me répondre. Autour de moi les gens se déhanchaient, envoûtés par la musique, comme en transe. L'un d'eux me bouscula légèrement et je me retrouver un peu plus proche de GD. En pleine affaire ma présence ne l'ennuya pas le moins du monde. Il enroula son bras autour de mes épaules et continua sa transaction comme si de rien était. GD était le dealer de la boîte. Tu voulais planer ou profiter encore plus du moment, GD avait ce dont tu avais besoin. Aussi professionnel qu'un médecin charlatan ou qu'un escroc au charisme de commercial. Je le sentis se figé lorsqu'il se tourna vers moi. “Oh merde ! Spero, qui t'as fait ça ?” Je me dégageais peu encline à étaler mes dernières mésaventure mais en ce faisant je grimaçais. Il souleva mon T-shirt et aperçut, en plus de ma lèvre éclatée et de mon bleu à la mâchoire, ecchymose au niveau de mon abdomen.”Oh put*** ! Je vais lui éclater sa gueule ; où il est ?” Je connaissais GD depuis plus de cinq ans et ce fut bien la première fois que je crus en l'authenticité de ses paroles. “C'est rien.J'ai pas besoin d'un preux chevalier, surtout pas un à la langue de serpent, ok” me défendis-je fébrile. Il ne s'offusqua même pas. L'habitude ? Plutôt qu'il savait très bien qui il était et ce que pouvait valoir sa parole. “N'empêche que la prochaine fois que je le vois je lui fais une offre spécial moi jte l'dis !”. Le voir s'énerver ainsi me fit trembler comme une feuille. Il le vit, il se calma. “Poupée, j'ai exactement ce qu'il te faut.” Il sortit des cachets de sa poche en jeans et en plaça un dans la paume de ma main. “T'inquiète c'est offert.” Il approuva de la tête et j'avalais. “Special K, bébé. Ça va te faire du bien.”