Étendu sur le lit, je regardais le plafond décoré de plusieurs ampoules formant une sorte de ciel étoilé. J’entendais la voix de Calixta étendue à mes côtés. «
Jamie tu écoute ? » me demandait-elle en refermant le livre qu’elle était en train de lire. Un sourire amusé s’affichait sur mon visage, je me tournais sur le côté pour la regarder. Même si cinq années nous séparaient, ma sœur et moi étions très proches. J’acquiesçais d’un signe de la tête vigoureux, lorsqu’elle me racontait une histoire, j’avais l’amabilité de l’écouter tendant l’oreille à chacun de ses mots. Elle me toisait un instant, ce qui eut pour effet de déclencher mon hilarité. Je me tournais sur le ventre, déposant mon menton dans mes mains. «
Continue, s’il te plait. » implorais-je avec ce petit sourire amusé. Dans ce silence qui régnait autour de nous, j’entendais la voix de nos parents qui s’élevait dans la maison. C’était souvent ainsi chez nous et on ne trouvait que la tranquillité qu’entre nous. Je voyais son regard bleuté se diriger vers la porte et je faisais de même. Revenant vers elle, alors que je voyais ses yeux s’humidifier. «
Calixta ? » disais-je de ma petite voix de garçonnet de cinq ans. Elle secouait la tête faisant voler ses boucles blondes de droite à gauche, avant de porter son regard cette fois sur moi. Un fin sourire vint s’afficher sur ses lèvres, me faisant aussi sourire en retour. Je savais que quelque chose n’allait pas, mais je n’arrivais pas à comprendre ce que ça pouvait être. Elle ouvrit le livre, cherchant du regard où elle s’était arrêtée. «
Voyons… Ah oui, Petit cochon, laisse-moi vite entrer ! Le petit cochon cria encore plus fort que le loup : Jamais de la vie ! Par ma queue en tire-bouchon ! » J’étais émerveillé de la voir jouer les rôles de chacun des personnages, prenant diverse voix, laissant son visage s’animer pour donner vie à ce conte pour enfant. Je répondais avec étonnement à chacune des actions, à la fin de l’histoire, je me tournais sur le dos, levant mes bras vers ce ciel étoilé. «
Moi quand je serai plus grand, j’aurais une belle maison en brique rouge. Comme ça aucun loup ne pourra venir la détruire. » disais-je avec un large sourire, je l’entendais rire près de moi. Continuant à regarder le plafond, je laissais mes yeux se fermer petit à petit pour finalement m’endormir dans son lit.
Ma sœur était tout pour moi, elle était celle qui arrivait à me faire oublier que notre famille n’avait rien d’unie. La neige tombait doucement, s’accumulant sur le rebord de la fenêtre close. Seulement, je n’étais pas comme les autres enfants, regardant les flocons tomber en espérant voir le Père Noël arriver. Non, mon regard était rivé sur un lit d’hôpital. Un bruit incessant résonnait dans ma tête, je voyais tous ces gens alertés par ce qui semblait être urgent. Je ne bougeais pas, ne comprenant pas ce qui se passait sous mes yeux. Au bout d’un instant, je m’avançais vers le lit. «
Calixta ? » disais-je d’une voix faible, regardant le corps de ma sœur étendue sur son lit. Elle semblait dormir, tout allait aller mieux. Je le savais, elle me l’avait promis. Elle m’avait dit qu’elle ne me laisserait jamais seul. Elle me l’avait promit ! Mes doigts caressèrent les siens, ils étaient plus froid que d’habitude, mais c’était normal on était en hiver, on avait toujours froid en hiver. Sa peau était plus blanche qu’à l’accoutume, mais elle devait avoir eu son traitement dans la journée, ça la rendait toujours plus faible. Elle dormait tout simplement, alors pourquoi tout le monde semblait prit de panique. «
Calixta ! » répétais-je avant de me faire remarquer par un homme vêtu d’un sarreau blanc. «
Sortez cet enfant d’ici ! » hurlait-il en me pointant du doigt. Je refermais ma main sur celle de ma sœur, alors qu’une infirmière déposait sa main sur mon épaule. Je la repoussais violemment, sentant mes joues devenir humide. Pourquoi Calixta ne se réveillait pas ? J’avais beau l’appeler, elle n’ouvrait pas les yeux. Je ne voulais plus rire, oh ça non. La femme près de moi essaya une nouvelle fois de m’éloigner de ma sœur et je sentais ce cri déchirer ma gorge. Voyant sans doute que n’allait pas lâcher prise facilement, ils se mirent à plusieurs pour me sortir de la chambre, alors que l’homme à la blouse blanche se penchait sur elle. Je m’entendais hurler, me débattant de toutes mes forces, criant son nom, implorant qu’elle se réveille. Je voyais le visage de mon père qui me regardait avec une expression que je n’allais jamais oublier. Quant à ma mère, assise sur une chaise près de lui pleurait, cachant son visage de sa main. Je continuais d’hurler, de me débattre comment pouvaient-ils rester là sans rien faire. Je les détestais de ne rien faire pour réveiller Calixta. Pendant un moment, je continuais à me débattre, jusqu’à l’épuisement. Retenu par un infirmier, je m’endormais dans ses bras à bout de force. Mon visage baignait de larme, je n’avais pas porté d’attention à tous ces gens qui nous regardait, enfin me regardait. Tout ce dont j’étais certain c’était que j’avais été vilain. Sinon le Père Noël m’aurait offert ce cadeau que je chérissais plus que tout : une parfaite santé pour Calixta. Rien, nada. Il me l’avait simplement volé lors de la nuit de Noël de mes six ans. Je l’avais compris en me réveillant sur la chaise de la salle d’attente. Me levant, j’étais retourné dans sa chambre et j’avais trouvé son lit vide.
Assis sur le rebord de ma fenêtre, je regardais la cours s’animer de tous ces gens qui venaient pour lécher le cul de mon père – Ne mâchons pas nos mots, y’a pas mieux pour décrire. Mon walkman sur mes oreilles, j’essayais de ne pas penser à ce qui m’attendait. Quatre années que Calixta était décédée et la famille, si je peux dire, allait encore plus mal qu’avant. Ma mère s’était mise à boire une quantité incalculable d’alcool, alors que mon père ne s’occupait plus de nous. Je savais que l’un comme l’autre ne s’aimait pas, inutile de dire que c’était aussi visible que le nez au beau milieu du visage. Je tournais la tête vers mon lit où trônait une peluche ourson, je ne me souvenais plus de son nom, mais elle avait appartenue à ma sœur. Me levant, je poussais un soupire. Un bref coup d’œil dans la glace m’indiquait que tout semblait parfait, enfin selon les critères de mes parents. À dix ans, il n’y avait jamais rien d’intéressant dans un brunch entre adulte, mais je devais faire bonne figure. J’allais quitter ma chambre, lorsque j’entendis des pas dans le couloir, ouvrant doucement la porte de ma chambre, je jetais un coup d’œil. Une femme d’à peine vingt ans tirait sur la cravate de mon père. Elle riait et je le voyais aborder un sourire. Fronçant mes sourcils, je les regardais passer devant moi avant de sortir et de les suivre. Je n’avais jamais vu mon père afficher un air aussi complaisant. Ils entrèrent dans une pièce dont la porte resta ouverte, regardant j’entrouvris la bouche, avant de partir en courant. Comment pouvait-il faire cela ? Je ne comprenais pas pourquoi. Dévalant les marches et arrivant dans le jardin, je tombais sur ma mère coupe de martini à la main. «
Jamie ! Où cours-tu comme ça ? » me demanda-t-elle en déposant sa main sur mon épaule. Je relevais mon regard vers elle, essoufflé. «
J’ai cru que tu m’appelais. » mentais-je pour ne pas dire ce que j’avais vu. J’ignorais si mon mensonge passerait, n’ayant jamais menti outre sur mon sentiment à propos de la mort de ma sœur. J’avais enterré tous mes sentiments à propos de son décès prématuré. Ma mère afficha un large sourire. «
Mais qu’est-ce que tu racontes ? » me demandait-elle, alors que ses amies s’approchaient de nous. Je relevais mon regard vers l’étage, secouant la tête je revenais vers elle. «
J’ai dû confondre. » disais-je en poussant un soupire. Maintenant, je me sentais observé par toutes ces femmes. «
Maurine, c’est Jamie ? » demandait l’une d’elle en me regardant, détaillant les traits de mon visage. Ma mère acquiesça d’un signe de tête. «
Mais comme il a grandi, il ressemble de plus en plus à son père. Il va faire des ravages plus tard. » poursuivait-elle en m’observant, je lui souriais d’un sourire faux. M’excusant, je quittais la terrasse pour aller plus loin dans le jardin. Il était hors de question que je ressemble à mon père. J’avais en horreur cet homme avare de pouvoir.
Debout sur le podium, je regardais mon père serrer la main des électeurs pour cette élection. J’avais les mains dans les poches de mon pantalon, regardant dans le vide ce qui m’entourait. Dans quelques jours, j’allais partir pour Montréal et toutes ces histoires de famille serait fini. J’avais seize ans et la dernière chose que j’avais en tête c’était les élections fédérales. Je faisais tout de même acte de présence, mais mon père ne devait pas espérer plus de ma part. Ma relation avec lui se détériorait à vue d’œil. Ma mère près de moi souriait comme elle avait l’habitude de le faire, serrant la main de ceux qui venait la voir. «
Jamie tu pourrais faire un effort et souri. Tu sais comment ça… » Je relevais mon regard vers elle, l’interrompant bien avant qu’elle finisse sa phrase : «
Inutile. Tu ne m’embarqueras pas là-dedans. On a rien de la famille parfaite et heureuse. Tu devrais le savoir plus que n’importe qui. » Je détestais ma mère qui rentrait dans ce moule pour satisfaire son mari, alors qu’il n’avait rien à faire d’elle. Je la soupçonnais d’être comme lui, cherchant son plaisir ailleurs. Je ne disais rien, mentant la plus part du temps. Je me renfermais sur moi-même, évitant de dire ce que j’appréciais ou non dans ce ménage. Elle me regardait et je voyais sa tristesse, mais depuis longtemps celle-ci ne m’affectait plus. Elle entrouvrit la bouche et je m’éloignais ne la laissant pas commencer sa phrase. Je n’avais pas envie de faire éclater une crise familiale, alors que tout le monde croyait à notre famille unie. Pour eux mon attitude n’était simplement que celle d’un adolescent qui voudrait ailleurs. Ce qui était en partie vrai. Je regardais tous ces gens, attendant de savoir si mon père allait être réélu dans son comté. Pour l’instant les Libéraux gagnaient du terrain, je regardais le logo du parti conservateur-libératiste qui dansait avec le drapeau. Adossé contre le mur, mon regard observait la télévision qui diffusait les résultats aux nouvelles. Je ne cachais pas mon désagrément en voyant ma mère arriver près de moi. «
Que veux-tu dire ? Nous sommes une famille unie ! » Je riais d’un ton glacial. «
Alors tu es bien la seule à le croire. Suffit de voir comment tu bois tous les jours pour savoir que tu n’aimes pas ta vie. Depuis la mort de Calixta, tu dégringoles. Ouvre les yeux, il y a longtemps que tu aurais dû le quitter, mais tous les deux vous êtes tellement superficielles que vous préférez être ensemble qu’avoir une mauvaise image de vous. » Une cacophonie d’applaudissement se faisait entendre dans la salle. «
Vas-y. Il t’attend. » continuais-je en fouillant dans la poche de mon veston. «
Ah oui, j’ai été accepté à l’Université en médecine. » lui avouais-je finalement, alors que je leur avais caché mes projets. Regardant une dernière fois mon père, je tournais les talons, et quittait l’endroit pour rentrer chez moi. Seulement, je faisais un arrêt au cimetière où se trouvait ma sœur. M’asseyant au pied de sa pierre tombale, je regardais le ciel. «
Aujourd’hui, je ne suis personne, mais bientôt j’empêcherai que d’autre connaisse la même séparation que nous. Calixte, tu es mon inspiration, ma bonne étoile… Ma maison de brique rouge. »
Assis dans la salle de classe, je portais mon crayon à mes lèvres mâchant son extrémité alors que l’enseignant d’anatomie nous présentait un corps ayant une scoliose. J’étais le plus jeune étudiant de mon année, les autres élèves avaient au moins deux ans de plus que moi. J’avais découvert qu’au Québec on devait avoir fait ce qu’il appelle le Cégep, mais l’administration avait accepté mon dossier en voyant mes résultats et un mémoire que j’avais écrit sur le cancer de ma sœur. Avec mon accord, il l’avait publié dans une revue médicale, je n’avais pas pu dire non. Maintenant, je me retrouvais dans ce cours préparatoire au doctorat. Je ne disais pas mon âge, je ne me ventais pas d’avoir sauté quelques années, non je gardais en quelque sorte un profil bas. Tout comme je ne disais pas qui était mon père, mentant aussitôt que quelqu’un se posait la question en référence avec mon nom de famille. Même si je ne désirais pas être identifié à lui, je l’avais tout de même remercié lorsque j’avais appris qu’il payait mes frais de scolarité. Encore une question d’image sans doute, mais je n’allais pas refuser son argent. Certains l’auraient fait par principe, moi j’y voyais une opportunité qui allait me permettre d’arriver à la fin de mes projets. Je pouvais ainsi me concentrer sur mes études et ne pas perdre mon temps à chercher l’argent pour les payer. Je griffonnais quelques schémas en marge de mon livre d’anatomie, ponctuant celui-ci de diverse note et commentaire. Je biffais certain mot pour en placer des plus adéquats. En fait, tous mes livres d’écoles étaient barbouillés de commentaires, de notes et de petits dessins. Ma calligraphie avant si soignée devenait de plus en plus des pattes de mouche à force d’écrire rapidement. Je savais que si on me demandait à voir mes notes, j’étais le seul à me comprendre dans cette écriture rapide et réduite à une forme phonique plus qu’à des mots qu’on pourrait trouver dans un dictionnaire. L’enseignant nous donnait un devoir tout aussi chargé que les huit autres cours du programme. Je fermais mon cahier, mettant le tout dans mon sac en bandoulière. «
Jamie tu te dépêche ? » Je relevais mon regard vers une brunette qui me faisait signe. Mettant la sangle de mon sac sur mon épaule, je poussais la chaise pour me diriger vers elle. «
Donne-moi au moins le temps de prendre mes affaires ! » disais-je en me faufilant parmi les autres élèves jusqu’à arriver vers elle. Son sourire s’illuminait en me voyant à ses côtés, je savais qu’elle espérait quelque chose entre nous, mais je ne désirais pas partir sur une mauvaise base. J’avais besoin de me sentir loin d’être comme mon père. Ce qui n’était pas chose facile, puisqu’avant mon départ pour Montréal, je devenais de plus en plus comme lui. Eh oui, j’avais beau avoir que seize ans, j’étais déjà un homme à femme. Seulement, cette fois, j’étais ici pour ma sœur et je voulais me consacrer à mes études. «
Tu te souviens c’était quoi les trois types de scoliose ? » Je tournais mon regard vers elle, haussant un sourcil. «
Tu n’as pas écouté ? » demandais-je en replaçant ma sangle que je sentais glisser sur mon épaule. Je voyais ses joues se teinter d’une faible couleur rose. Roulant mon regard vers le ciel, je tournais au bout du couloir pour me diriger vers l’endroit où on pouvait acheter du café. «
Il y a la congénitale, la syndromique et l’idiopathique. » Je n’avais pas regardé mes notes, je m’en souvenais très bien. «
La prochaine fois souvent toi du sujet de la journée. » continuais-je en affichant un sourire en coin. Je devais bien admettre que je ne comprenais pas comment elle faisait pour suivre si elle n’arrivait pas à se souvenir de chose aussi simple. «
Ne te moque pas veux-tu ! » Un sourire planait sur mes lèvres, alors qu’on se mettait en file pour commander notre café.
Quand je disais que je ne voulais pas mêler relation et étude, j’étais debout derrière le plan de travail de mon studio préparant le repas après une journée d’école plus qu’émouvante, je sentais Astrid devant moi qui faisait les cent pas. «
Comment tu peux la voir en même temps que moi ! » me hurlait-elle en s’arrêtant et me regardant alors que j’avais mon regard tourné sur la carotte que j’étais en train d’éplucher. «
Tu vas rester là sans me parler ! » Je sentais bien le ton de sa voix augmenté, elle perdait patience face à mon silence. Je relevais mon regard pour la regarder. «
Que veux-tu que je te dise ? » Retournant à ma carotte, je ne remarquais pas son air hébéter suite à ma réponse. J’étais tellement au-dessus de cela, je ne voyais même pas pourquoi elle en faisait un drame. «
Que tu me dise ? » répétait-elle avec une voix plus mélancolique. «
Que tu regrettes. Que tu as eu un écart de conduite ! » Je poussais un soupire, pourquoi ça devait être si compliquer que cela. J’avais tant cherché à être différent de mon père que finalement j’étais comme lui, peut-être pire. J’avais tout fait pour garder une distance avec ce genre d’histoire, mais au final le nature revient toujours au galop et je n’avais pas pu échapper à l’envie d’avoir une femme dans ma vie, puis une seconde, une troisième, allant jusqu’à une quatrième et cela tout en même temps. J’étais ainsi et même si je n’aimais pas cela, je ne pouvais m’empêcher de le faire. «
Tu serais plus heureuse si je te disais ça ? » Si je voulais être franc, je ne regrettais rien et si c’était à refaire, je le referais sans hésiter. Étais-je sans cœur ? Je ne pensais pas, on n’avait simplement pas les mêmes idéaux tout comme je trouvais plus facile de me consacrer à plusieurs, plutôt que de passer mon seul temps avec une qui finirait par me bombarder de question sur moi. «
Est-ce que tu le penserais au moins ? » demanda-t-elle, alors que j’haussais les épaules. «
T’es vraiment qu’un gamin Jamie ! » Ne brochant pas, je ne relevais même pas mon regard vers elle, continuant patiemment à éplucher les carottes. «
Si tu le dis. » Après je n’avais même pas dix-sept ans, elle pouvait bien m’imaginer comme elle le voulait. «
Tu restes pour manger ? » continuais-je comme s’il n’y avait rien à ajouter, ce que je croyais. «
Comment tu peux être aussi froid ? Tu m’as fait miroiter des choses ! Si tu ne voulais pas être avec moi, tu n’avais qu’à dire non ! » Poussant un soupire, je déposais l’éplucheuse sur le plan de travail, pinçant mon os propre de mes doigts. «
Je n’ai jamais dit que je n’avais pas envie. C’est toi qui te fais tout un cinéma. » «
TOUT UN CINÉMA ! C’EST BIEN TOI QUE J’AI SURPRIS À EMBRASSER UNE AUTRE FILLE. » Elle hurlait désormais, provocant mon héritabilité. Ramenant mon regard vers elle, je remarquais ses yeux vitreux, mais je n’en faisais pas plus de cas. «
Oui, et ? Je n’ai jamais signé un contrat pour être exclusif à toi que je sache. » Cette conversation n’avait rien de celle de personne de dix-sept et dix-neuf ans, je me sentais comme un vieux couple qui avait un désaccord. Seulement, celui-ci n’avait rien à voir avec celui qui a volé la couverture pendant la nuit. «
T’es qu’un connard ! » disait-elle en prenant son manteau et son sac avant de quitté mon appartement. Je ne cherchais pas à la rattraper, revenant simplement à mes carottes.
Me tenant devant la vitre d’une chambre, je regardais une femme étendue sur l’un des nombreux lits de l’hôpital où je faisais mon premier stage. Elle riait avec ce qui semblait être ses enfants, je reconnaissais ce sourire qui voulait dire que tout l’allait bien, mais qui en fait n’était qu’une douloureuse façade. Je l’avais vu si souvent sur le visage de Calixta, tournant les talons je laissais cette famille à leur bonheur. Me passant une main dans mes cheveux, je revenais à l’urgence où se déroulait mon stage. «
Jamie ! » Tournant la tête, je voyais ma superviseure de stage qui approchait, elle avait quelque chose de charmant. Sur cette petite pensée, je la voyais perdre pied et je m’empressais de me diriger vers elle pour l’empêcher de tomber. Prenant ses avant-bras, je la soutenais puis la soulevais, affichant un sourire amusé. «
Ça va ? » demandais-je tout de même sachant qu’il y avait sans doute plus de peur que de mal. «
Oui, je suis simplement très maladroite. » répondait-elle en relevant le regard vers moi. Ça avait quelque chose d’Hollywoodien dans cette image de prince charmant qui aide la jeune femme maladroite. «
Merci. » rajoutait-elle alors qu’elle détournait son regard du mien. «
Y’a pas de quoi. » M’assurant qu’elle tenait bien sur ses deux pieds, je m’éloignais d’un pas ou deux pour prendre une légère distance. «
Tu m’appelais pour quelque chose en particulier ? » finissais-je par demander avec cet éternel sourire. Je la voyais passer sa main dans ses cheveux. Les femmes ont souvent ce genre de tic lorsqu’elle désire quelque chose ce qui avait toujours sut m’amuser. J’avançais mon visage vers elle, montrant ainsi que j’attendais une réponse. «
En fait, on est plusieurs au Saint-Sulpice et je voulais savoir si tu voulais venir avec nous ? » Je n’avais rien contre une bière, et je me retrouvais à accepter son offre. J’avais tout de même dix-neuf ans, je pouvais prendre un peu de temps pour vivre ma vie de jeune adulte ! Deux heures plus tard, je sortais de l’hôpital rejoignant un petit groupe d’employer. Je connaissais la plus part de vue, mais sans plus. Gravissant la côte, on riait, discutait de diverse chose qu’on avait vue au sein de l’urgence. J’étais étonné de savoir ce qui pouvait se passer pendant certain service, après on était dans un coin de la ville où drogué, sans-abri et diverse gens se tenaient, alors il n’était pas étonnant de voir certaine chose. «
Jamie, tu es anglophone ? » Je relevais mon regard vers une fille qui m’avait adressé la parole. Même si j’avais appris à me débrouiller en français, mon accent restait très présent et j’en étais conscient. Pour certaine femme ça avait le don de les charmer. «
C’est si perceptible que cela ? » demandais-je avec une touche d’humour dans la voix. On arrivait finalement au bar, prenant une table sur la terrasse. On n’avait vraiment rien de sérieux, comme si on avait laissé celui-ci au vestiaire. Après la troisième bière, certain partir et très vite je me retrouvais seul avec la jeune femme qui m’avait demandé si j’étais anglophone. Inutile de dire que la soirée se fini bien vite dans mon appartement. La lune avait atteint son apogée et j’ouvrais les yeux, sentant la douce chaleur du contact humain. Poussant un bâillement, je me levais pour aller à la toilette. En revenant, je m’arrêtais devant la porte de mon bureau, ouvrant la porte, je regardais mon ordinateur qui affichait une mise en veille. Pinçant mes lèvres, je m’approchais pour bouger la souris. L’écran produit un vrombissement avant de s’ouvrir sur une page word où plusieurs lignes avaient été tapées formant de nombreuse page sur le seul sujet qui hantait mon esprit. Je me laissais tomber sur la chaise devant cet écran clair. Même si je disais rien, même si je sentais mes entrailles se tordre, je savais que ce simple écrit pourrait sans doute aider certaine personne. Il n’avait rien bien scientifique contrairement à des articles que j’avais déjà publié. Il était plus proche de l’homme et de ses malheurs. Entendant les lames de plancher grincer, je me levais pour voir la jeune femme avec qui j’avais passé la soirée portant mon t-shirt qui me regardait. «
Qu’est-ce que tu fais là tout seul ? » Je laissais mon sourire prendre place sur mes lèvres, avant de m’avancer vers elle. «
Rien qui te regarde. » C’était froid et j’en étais conscient, mais je n’aimais pas qu’on se mêle de mes affaires.
Plus de cinq années s’étaient écoulées depuis que j’avais fait le choix de faire ma spécialisation en cancérologie. J’étais à l’approche d’être enfin nommé médecin cancérologue. «
Jamie ! » Je secouais la tête, relevant mon regard vers l’infirmier qui me regardait sévèrement. «
Tu ne peux pas rester ainsi. » Ma bouche s’entrouvrait et je reportais mon regard sur ce corps couché dans ce lit monotone, on voyait très bien que la vie avait quitté ce corps. Ces yeux vitreux qui se portaient dans le vide, cette perte de cheveux qui se voyait encore avec les reflets de la lumière nous montrant un faible duvet. En découvrant que ma patiente allait de moins en moins bien, j’avais passé une bonne partie des derniers jours à ses côtés, jusqu’à son décès, qui m’avait rentré dans une léthargie inattendu. Je n’avais pas appelé l’assistance médicale, tout au contraire j’avais failli à mon devoir en tant que médecin. L’infirmier appuya sur le bouton et je me levais, quittant la pièce sans un mot. Dix-neuf heures vingt avaient été l’heure du décès de Sophie Tremblay, une jeune trentenaire qui avait encore la vie devant elle. Qui était mère d’un jeune garçon. Qu’est-ce que j’allais pouvoir dire à sa famille, quittant la chambre où l’odeur de la mort se faisait déjà sentir, je marchais dans le couloir silencieux avant de prendre la porte de sortie de secours. J’avais tellement envie d’hurler mon échec, frappant mon poing contre le mur, je laissais mes jointures vivre ma douleur. Je m’étais toujours promit de n’avoir aucun échec, je lui avais promis avant de partir. Après tant d’années à travailler durement, approchant de plus en plus du but que je m’étais donné, je découvrais la déception. Je n’avais plus pleuré depuis la mort de ma sœur, mais aujourd’hui mon corps se faisait envahir par les larmes, le désespoir, le malheur. Regardant ma main en sang, je poussais un soupire avant de me laisser glisser le long du mur, m’assoyant sur ce sol froid, pliant mes genoux contre moi. Je me sentais redevenir ce gamin que j’avais été tant d’année auparavant, ce gamin qui avait perdu une bataille en voyant ce loup que l’on appel cancer faire volé sa petite maison de paille. Aujourd’hui, je venais de perdre ma maison de bois. C’était quelque chose qui me terrifiait, mais je devais me relever, prendre sur moi et maintenant me bâtir une maison de brique.
Mon livre se trouvait déjà sur de nombreuse tablette de librairie, je n’avais pas fait traduire celui-ci préférant le laisser dans ma langue maternelle. Je n’en revenais toujours pas d’avoir publié un livre aussi jeune dans ma carrière et il connaissait un succès auquel je ne m’attendais encore moins. J’avais fini mes études, on m’avait offert un poste dans ma ville natale. Je n’avais néanmoins pas revu mes parents, je ne leur avais même pas dit que j’étais de retour, si on peut dire. Assis sur un banc dans l’herbe bordant l’établissement publique où je travaillais, mon regard se perdait dans le flux de gens qui marchait, courrait, vivait. Avais-je ma place ici ? Buvant une gorgée de café, regardant ma montre et poussant un soupire lasse, je me relevais lorsque mon portable se mit à vibré dans ma poche. «
Allô. » disais-je sans même prendre conscience de qui pouvait m’appeler. «
Bonjour puis-je parler à Monsieur Copperman ? » La voix semblait féminine, mais assurée. Confirmant que j’étais cette dite personne, je m’autorisais à lui demander qui elle était. C’était un peu la moindre des choses en quelques sortes surtout que je n’avais pas la moindre idée des raisons de cet appel. «
Je suis Elizabeth Kingston directrice de l’université David Geffen de Los Angeles. J’ai lu votre livre et vos recherches m’ont intrigué. J’aimerais vous offrir un poste comme enseignant chercheur dans notre établissement. » J’en restais bouche bée, pourquoi me demandait-il à moi ? «
Comment avez-vous eu mon numéro ? » Généralement, j’avais de la réparti, mais cette fois, cette femme avait réussi à m’abasourdir. Je relevais mon regard vers l’établissement qui se trouvait devant moi. Même si j’étais ici que depuis trois mois, je n’y trouvais pas ma place. Certes, je travaillais sur les cancers, mais je me sentais oppresser par cette ville. «
Oh ! En fait, j’ai simplement communiqué avec votre éditeur et on m’a parlé de vous. Et je suis certaine que vous êtes l’homme qui nous faut. » Bien malgré moi, je laissais un rire s’échapper de mes lèvres. «
Vous êtes certaine ? Je n’ai que très peu d’expérience. » Vingt-six ans et on m’offrait un poste comme celui-ci. C’était simplement surréaliste. «
Certaine. Nous avons besoin de quelqu’un comme vous, la maturité dans vos propos écrit on sut nous montrer qui vous étiez. Il existe une expérience qui s’acquière et une innée, j’ignore si la vôtre est innée, mais il est certain que vous vous passionnez pour ce que vous faites. Et c’est bien quelque chose qui manque dans nos locaux. Vous aurez un poste en tant que chercheur dans l’hôpital affilé à notre école. Vous aurez amplement le temps de faire vos preuves. » Je prenais une grande respiration, mon regard toujours rivé sur les lettres Emergency. «
J’aimerais prendre le temps pour y réfléchir. » avouais-je avec étonnement. «
Bien sûr, mais sachez que notre offre peut vous glisser entre les doigts. Donc n’attendez pas trop. » Je la remerciais, fermant mon portable avant de retourner travailler. Lorsque j’eus fini, je quittais l’hôpital, mais au lieu de me rendre chez moi, je faisais un détour par le cimetière. Le grillage était cadenassé, mais qu’importe, j’escaladais la grille pour m’introduire par infraction dans ce lieu de repos. Flashlight en main, je me guidais parmi les pierres tombales, jusqu’à arriver devant l’une d’elle où le granite commençait à vieillir. Il n’y avait pas eu de fleur depuis longtemps. Fermant la seule lumière qui me permettait de voir, je m’assoyais le dos contre la fraîcheur de la pierre. Pendant plusieurs minutes, je restais là sans parler, sans bouger. Les yeux fermés, mes jambes ramener contre mon torse, j’avais enfoui mon visage entre elles. Partir ou rester ! Pourtant, ce choix aurait dû être facile, mais non tout devait se compliquer dans ma tête. Je passais la nuit appuyer contre la pierre tombale de ma sœur, le soleil se levait doucement plongeant la ville dans une agréable douceur. Je restais immobile, puis les heures s’écoulèrent. Je n’avais pas fermé l’œil de la nuit, réfléchissant aux pour comme aux contre. Prenant finalement mon portable, je rappelais le numéro qu’elle m’avait laissé. «
Madame Kingston, j’accepte votre offre. »
Fermant la porte de mon studio que j’avais pu me trouver à Pasadena – Pourquoi Pasadena ? C’était beaucoup moins cher que Los Angeles. Je passais mon sac sur mon épaule, serrant contre mon flanc les livres que je n’avais pas pu mettre dans mon sac. Sur le perron, je regardais droit devant moi, prenant une grande respiration avant de descendre les quelques marches pour me rendre jusqu’à ma voiture. C’était une sensation étrange que je ressentais au creux de mon estomac, j’avais toujours cru que ma vocation était la recherche, la médecine, le cancer et voilà que je rajoutais à ma palette enseignant. Je n’avais pas la moindre idée de ce que pouvait bien penser mes élèves en me voyant arriver devant eux. Sentir tous ces regardes de l’amphithéâtre diriger vers moi me rendait incertain. Pourtant, étais-je prêt à me monter ainsi devant autant de personne. J’aimais être vu, mais cette nouvelle optique me laissais une certaine réserve. L’inconnu peut-être quelque chose d’effrayant et pourtant, je sautais à pied joint vers cette nouvelle aventure. Conduisant vers Los Angeles, je laissais la musique de la radio calmer mes craintes jusqu’à arriver sur le campus de l’école. Une arrivée qui m’enchanta aussitôt que mon regard se portait sur toutes ces étudiantes. Je n’avais malheureusement pas changé, bien malgré moi j’aimais toujours autant les femmes et je ne le cachais pas. J’aurais sans doute pu, mais cette partie de moi s’encrait de plus en mon être. Je devenais cet homme que je fuyais et je ne trouvais pas la force ni le courage pour l’arrêter. Tout au contraire, ça me rendait heureux, aucune attache, aucune peine, aucune trahison, tout ce jouait qu’avec moi. Prenant mes livres et mon sac, j’avançais sur le terrain du campus, souriant aux jeunes filles que je croisais. J’arrivais quelques minutes devant la porte de ma classe après m’être arrêté au bureau de la directrice qui m’avait donné tout ce dont j’avais semble-t-il de besoin. Prenant une grande respiration, je tournais la poignée de ce qui allait devenir ma classe. Il n’y avait encore personne et je poussais un soupire, disposant sur mon bureau livre et dossier. Mon regard s’arrêtait sur une liste d’élève, une cloche, du brouhaha. Bien vite, je me retrouvais devant une classe bondée d’étudiant et dire qu’il n’y a pas si longtemps j’étais à leur place. Une jeune femme à la chevelure rousse s’approchait de moi. «
Excusez-moi, je ne suis pas en retard ? Le professeur n’est pas encore arrivé dit-moi ? » Un sourire apparut sur mes lèvres, alors que je faisais un signe négatif de la tête. Elle alla s’assoir et je prenais une profonde respiration. «
Bonjour, je m’appelle Jamie Copperman et je serai votre enseignant en recherche sur le cancer. Vous devez vous dire que j’ai l’air bien jeune pour être là devant vous. Eh bien, vous n’êtes pas les seuls à vous demander cela. J’ai connu des défaites, mais beaucoup plus de victoire encore, je n’ai pas peur d’aller de l’avant et encore moins de pousser les recherches au-delà de ce qu’on imagine. Pour être dans ma classe vous ne devrez avoir peur de rien, mais surtout ne pas avoir peur de vous relever malgré les défaites que vous connaîtrai. Alors commençons. »
Une nouvelle année commençait pour moi en tant qu’enseignant, je réussissais à jongler entre l’hôpital, l’université, mes écris et mes conférences. On pouvait me qualifier d’homme occupé et pourtant, je trouvais toujours du temps pour des femmes. Je dis « des » car ce n’était jamais la même. Assis à mon bureau, je tournais dos à la porte pour porter mon regard dehors, l’été Californien était encore présent et la chaleur était étouffante. Un bruit attirait mon attention, non pas le chant d’un oiseau, mais plutôt les paroles d’une femme. Me levant de m chaise, je roulais mes manches de chemise, avant de porter mon regard vers l’extérieur. Une jeune blonde parlait avec animation à un jeune homme. Étant au rez-de-chaussée, je me laissais envahir par une impulsion. Pourquoi décidais-je de sortir de ma classe par la fenêtre, je n’en avais pas la moindre idée, mais parfois ce genre d’impulsion pouvait me prendre et que pouvais-je faire d’autre. Atterrissant sur l’herbe, je me dirigeais vers le duo, mais je n’avais pas eu le temps d’arriver à eux que l’homme partait. «
Est-ce que ça va ? » demandais-je à la jeune femme qui me faisait dos. «
J’ai entendu votre conversation et je n’ai pas pu m’empêcher de venir voir ce qui se pass… » Je ne finissais pas ma phrase en la voyant se tourner vers moi, elle avait quelque chose qui attira toute mon attention. Je laissais un sourire prendre place sur mon visage. Elle s’empressait de me dire que tout allait bien et je ne trouvais rien de mieux à faire que de lui sourire. «
Si vous avez besoin de parler, n’hésitez pas. Je m’appelle Jamie Copperman, je suis facile à trouver si vous demandez. » continuais-je en glissant mes mains dans les poches de mon pantalon et la quittant alors qu’elle me disait s’appeler Sophia, Sophia Steadworthy. L’après-midi arrivait et j’étais assis dans mon bureau admirant la silhouette d’une finissante, enfin une fille qui aurait dû finir, mais avait tout fait pour échouer mon cours. «
Monsieur Copperman, je suis ravie de voir que vous serez encore une fois mon professeur. » Je me levais, déposant mes mains sur mon bureau. «
Ne croit pas que ce sera comme l’année passée. » disais-je avec raideur. Je ne m’attachais jamais et je n’allais certes pas commencer maintenant, je savais les mots qui courraient à mon sujet, mais pourquoi les nier alors qu’ils étaient vrais. «
Mais Jamie ! » Un sourire plutôt glacial prenait place sur mon visage. «
Maintenant c’est Jamie, tu te familiarise. » continuais-je en faisant le tour de mon bureau. «
J’ai fait ça pour qu’on soit ensemble. Tu ne m’as pas rappelé la dernière fois. » Croisant mon regard avec le sien, je poussais un soupire. «
Il y a peut-être une raison à cela, maintenant laisse-moi je dois aller faire mon cours. » J’ouvrais la porte, la laissant passer avant moi, avant de quitter mon bureau sous le regard de quelques collègues. Ma classe était déjà remplie, lorsque je franchissais l’entrée, laissant les murmures s’estomper en entendant mes mocassins claquer sur le sol. «
Bonjour, je suis désolé de mon retard. » Je me présentais comme j’avais l’habitude de le faire, puis je passais aux présences. Aaron. Andy. Bastian. Sandy. Sophia Steadworthy. Je relevais mon regard, cherchant la jeune femme que j’avais rencontré un peu plus tôt. «
Ça va mieux ? » lui demandais-je comme si nous étions seuls dans cette classe. J’ignorais simplement que cette rencontre irait beaucoup plus loin…
Tenant dans ma main une lettre que je ne cessais de lire et relire, je poussais un soupire. Ça faisait déjà quelques mois que je l’avais reçu. Je ne comprenais toujours pas pourquoi elle était arrivée dans ma boîte aux lettres. Mais je devais trouver une solution et vite, ce que j’avais finalement fait. Portant mon regard sur le dessus de mon bureau, je regardais cette minuscule boîte en velours. C’était semble-t-il ma seule chance. Serrant la lettre dans mon tiroir que je verrouillais avec l’ébauche de mes idées pour un second livre, je prenais le boitier que je glissais dans la poche de mon veston. Lissant les pans de mon veston, je me dirigeais vers la sortie de mon bureau. Dans tout cet appartement c’était mon seul havre de paix. «
Tu es prête ? » demandais-je en regardant vers la chambre où en sortait une blonde. Sophia. Pourquoi est-ce que j’avais choisi cette fille ? J’avais mes raisons, mais aussi elle avait ce petit quelque chose que les autres n’avaient pas. Je n’arrivais pas à mettre le doigt dessus, mais lorsque j’avais reçu cette lettre, elle avait été celle qui m’était apparu comme le meilleur choix. Je savais que sa naïveté y était pour quelque chose et je pouvais bien l’utiliser à mon avantage. «
Tu es sublime. » la complimentais-je en lui tendant la main pour la conduire vers la sortie. Je savais que si on franchissait cette porte tout sera dessiné, ce gala qui nous attendait, ce repas au restaurant. Sans réfléchir je me mettais à genoux devant elle, sortant de ma poche cette petite boîte en velours. Je toussotais, relevant mon regard vers elle. «
Je sais ça va te paraître complètement fou, ça ne fait que quelques mois qu’on sort ensemble. Mais je me sens tellement différent avec toi, je me sens comme un autre homme. J’ai tellement envie de vivre à tes côtés, de partager chaque moment avec toi. Je n’ai jamais connu d’autre façon que de prouver son amour à quelqu’un. » Je n’y croyais pas, je n’y avait cru, mais je devais jouer le jeu. Ouvrant le boitier, je la regardais analysant chacune de ses expressions. «
Miss Steadworthy voulez-vous devenir ma femme ? » J’ignorais si elle dirait oui, c’était tellement imprévisible de ma part que son refus me semblait plus que possible. Et pourtant, je souriais à sa réaction et après son acceptation, je me relevais lui passant ainsi la bague au doigt. Heureux, je lovais son visage entre mes mains pour lui voler un baiser. «
Marions-nous le plus tôt possible ! »
Nouant ma cravate, je me regardais dans la glace. C’était complètement fou, j’étais là m’habillant pour me marier. Moi qui avait toujours voulu rester célibataire, enfin façon de parler. Je n’avais jamais cru au mariage, je ne me voyais pas vivre mes jours avec la même femme travaillant dure pour que notre mariage dure aux yeux de tous alors qu’à un moment où un autre on serait certain de tout perdre. Notre amour. Notre vie. Notre sourire. Et bientôt les vices s’enchaîneraient pour combler ce vide qu’on aurait créé. Lissant ma cravate, je poussais un soupire tout en croisant mon reflet. «
Ce n’est qu’une formalité. » tentais-je de me convaincre, car au fond de moi je savais qu’une personne n’aurait jamais été d’accord avec ce que j’allais faire. J’entendais les bruits d’un voile qu’on repousse, des pas qui se dirigeais vers moi. «
Tu ne crois pas que ce soit trop tôt ? » Tournant de l’œil jusqu’à m’en décoller la rétine, je tournais ma tête vers celui qui serait mon témoin. «
Quand on aime, il n’est jamais trop tôt. On se rapproche simplement du trop tard. » disais-je en prenant la boutonnière qu’il me tendait pour que je puisse l’aggraver à mon veston. «
Jamie, je te connais tu n’es pas le genre de mec à rester avec une seule femme. » L’épingle venait piquer le bout de mon doigt, grimaçant, je regardais la perle rouge se former au bout de mon doigt. «
Et si j’avais simplement changé ? Et si je l’aimais au point d’être fidèle pour le reste de mes jours ? Tu m’empêcherais tout de même de me marier ? » Mon regard se relevait vers mon témoin. Il ne semblait plus savoir quoi dire. En moi, je savais qu’il avait raison que tôt ou tard j’allais faire mal à Sophia, mais j’avais mes rêves et désormais elle avait un rôle à jouer dans l’obtention de ceux-ci. Je ne voulais pas la rendre malheureuse, je pouvais concevoir de faire un effort, mais je savais comme mon ami que le naturel revient toujours au galop. J’avais su lui mentir, lui dire que je ne voyais personne d’autre que cette vie d’infidèle avait pris fin, mais c’était loin d’être le cas, elle ne s’était jamais arrêter. Prenant une grande respiration, je me regardais une dernière fois dans le miroir avant de quitter la tente qui avait été monté sur cette place privé. Même si je ne connaissais rien au romantisme, je savais qu’il y avait quelque chose d’exceptionnelle à se marier sur une plage et dans la plus grande intimité. De toute manière, je n’aurais jamais prévenu ma famille de mon choix. Attendant sous le soleil, je tournais mes doigts dans tous les sens avant de voir le portrait de Sophia remonter l’allée, seule sa robe trahissait qui elle était. Puis je portais mon regard sur la seconde femme vêtu de blanc. Un sourire prit aussitôt place sur mon visage, je la regardais remonter l’allée, laissant mon cœur s’emballer. J’avais cet étrange sentiment qui naissait en moi. Puis je m’entendais dire : «
Oui je le veux. »
New York. Ça faisait deux ans que nous nous étions installé dans la grosse pomme, j’avais réussi à nous trouver un emploi à tous les deux en tant que médecin dans un hôpital de Manhattan. C’était différent de notre vie en Californie, mais au moins je savais que ses sœurs ne mettraient pas leur nez dans mes affaires. Je les soupçonnais de douter de moi et je préférais ne pas prendre de chance. Finissant mon service, j’avais tout laissé pour rentrer chez moi, alors que je savais qu’elle était toujours à l’hôpital. Je n’avais pas dormi depuis ce qui me semblait être une éternité que je préférais rentrer au lieu de l’attendre. De toute, notre relation n’avait rien d’une idylle. Arrivant devant notre appartement de l’Upper side, je saluais le portier me dirigeant vers l’ascenseur. Les portes s’ouvraient et elles allaient se refermer lorsque j’entendis une voix : «
Retenez-les ! S’il vous plait ! » Je m’empressais de mettre ma main entre celles-ci, les faisant s’ouvrir. Une femme arrivait faisant claquer ses talons sur les tuiles de marbre du hall d’entrer. «
Merci. Jamie ! » Je posais mon regard sur la nouvelle arrivante qui semblait plus qu’heureuse de me voir. Il y avait bien entendu une raison à cela, cette femme était ma voisine de pallier, mais aussi l’une de mes maîtresses. «
Rosalie. » Elle s’approchait et j’appuyais une nouvelle fois sur le bouton de notre étage. Mon regard observant la caméra de surveillance. «
Tu rentres tôt aujourd’hui ! Ta femme est toujours au travail ? » me demandait-elle avec sans nul doute une arrière-pensée. Je me tournais pour croiser son regard sombre. Elle n’avait rien de Sophia, aucune similitude, comme toutes les autres d’ailleurs. «
Si tu veux savoir si je suis seul, oui. Si tu veux sous-entendre que tu souhaites qu’il se passe quelque chose, oui. » La porte s’ouvrait sur notre étage, je la laissais passer avant moi. Puis elle s’arrêtait devant la porte de mon appartement. Je connaissais les raisons des adultères de Rosalie, un mari alcoolique qui avait fait faillite à la bourse. Il n’y avait rien de glorieux et elle passait son chagrin et sa haine à travers une aventure avec le voisin. Classique, mais si efficace. J’ouvrais la porte après l’avoir déverrouiller et tout s’enchaina tellement vite, laissant une trainer de vêtement derrière nous. Utilisant le lit, nous laissions nos pulsions nous envahir, je n’entendais même pas la porte s’ouvrir ni même les bruits de pas qui marchait sur les lames de plancher. Un souffle. Une surprise. Sophia. Poussant un juron, je me relevais prestement pour la suivre. «
Attend ! » Mais la blondinette ne semblait pas m’écouter. Je n’avais pas envie de dire des phrases déjà toutes faites et qui sonnerait horriblement en les disant. Je lui laissais quelques jours, avant de revenir vers elle la suppliant de rester avec moi. J’allais même jusqu’à dire que je regrettais ce que j’avais fait. Ce n’était pas tout à fait faux, car jamais je n’avais voulu la rendre malheureuse. J’avais su l’aimer, seulement j’avais tellement peur de plusieurs facteurs que d’être infidèle me semblait être une manière de me protéger.
Maintenant notre histoire me semble bien loin, du jour au lendemain je m’étais retrouver seul dans mon appartement. J’avais quelques jours plus tard reçu les papiers du divorce, mais je n’avais pas la force d’apposer ma signature sur ce document. Je laissais le temps faire son œuvre et j’avais bien l’intention de la reconquérir. «
Jamie écoute-moi bon sang ! » résonnait la voix à l’autre bout du téléphone. «
Quoi ! » rétorquais-je avec impatience. «
Comment tu peux être froid par moment. Je te disais que ce chapitre que tu m’as envoyé est une pure merveille. » Depuis que Sophia m’avait quitté, j’avais trouvé la force de recommencer à écrire. Je sentais le souffle du vent du loup qui frappait contre la brique de ma maison et ça avait suffi à me pousser pour reprendre où je m’étais arrêté. J’avais fait parvenir mes premiers chapitres à mon éditrice. Entrant dans l’immeuble où se trouvait mon appartement, je me fis appeler par le réceptionniste de l’accueil. Tendit une lettre notifiée d’un avocat, son avocat. «
Écoute, je vais te rappeler. » Je l’entendais rouspéter, mais trop tard je raccrochais l’appel. Arrivant chez moi, j’ouvrais l’enveloppe ouvrant le papier et fronçant mes sourcils en lisant chacun des mots. Sophia se trouvait en prison. Qu’est-ce qui avait pu se passer depuis son départ. Je déposais la lettre sur le meuble d’entrée, faisant les cent pas devant celui-ci. Et puis zut ! Prenant le plus d’effet que je pouvais, je me réservais un billet d’avion le plus tôt possible pour Pasadena et demandant mon transfert à l’hôpital de Californie, je me retrouvais à repartir dans le sud du pays. J’ignorais ce qui m’y attendait, mais en la sachant ainsi, je n’avais pas trouver mieux que de prendre le premier vol pour être près d’elle, qu’elle me déteste ou non. Car pour l’instant, j’étais son mari.