Comment aurait-elle pu avouer ça à son mari sans le mettre dans une colère noire ? Jane savait bien qu'il ne le lui pardonnerait pas, c'est bien pour ça qu'elle repoussait sans cesse le moment où il faudrait le lui dire. Plus d'une semaine s'était écoulé et bien des choses s'étaient passé entre eux. Ils s'étaient rapprochés et les enfants les avaient surprit dans une position bien délicate. La honte de leur vie, ça s'est certain. Oui, elle avait couché avec Ellen deux jours avant que Holden ne se décide à la toucher de nouveau. Et aujourd'hui elle se retrouve dans ce lit d'hôpital, le visage tuméfié et l'aveu merdique enfin déballé. Le choc de la situation et la morphine ont sûrement aidé à tout lâcher. Elle n'aurait pas du, elle en était bien consciente. Non pas qu'elle voulait continuer de mentir. Non, elle avait dans l'idée de tout avouer. Mais seulement à Holden, Kate n'aurait jamais du être mêlé à tout ça et la pauvre gamine se retrouvait à hurler son mécontentement. Elle était dans son droit et Jane n'ajouta rien. La colère de sa fille était justifié, bien qu'elle aurait aimé qu'elle cherche à en savoir un peu plus sur le comment du pourquoi. Jane n'a pas couché avec Ellen par vengeance ou pour blesser Holden. Tout ça n'était même pas prévu. Ce n'est que le résultat d'un trop plein d'alcool, rien de plus.
Regardant la jolie blonde passer devant elle en larme, Jane posa ensuite son regard sur son mari qui semblait prêt à exploser. Elle eut droit de nouveau à son petit rire qui la blessa puis il craqua enfin. Les cris étaient justifiés, tout comme ses reproches. Seulement il n'avait pas du tout comprit ce qui s'était réellement passé. Les larmes roulants sur ses joues, Jane l'observait déverser sa colère contre elle tout en pensant qu'il finirait par la détester tout autant que Joan. L'adultère est tellement impardonnable, ils ont toujours été d'accord sur ce point et elle se déteste pour ce qu'elle a fait.

_ Je suis désolée... je n'aurais pas du.

Bizarrement elle s'était calmé et c'est toute confuse qu'elle s'excusa. Autant pour ce qu'elle avait fait que pour l'avoir dit devant Kate. Il est certain qu'elle devra avoir une conversation avec sa fille pour tenter d'arranger les choses. Mais là, c'est avec Holden qu'elle devait avoir une conversation. Il fallait bien qu'elle essaye de se racheter à ses yeux, non ?

_ Ce n'était pas une vengeance Holden, je ne me suis pas dit tiens avec qui je pourrais coucher pour me venger ?! C'était juste une soirée comme ça, dans un bar. On a beaucoup trop bu et je me suis réveillée là bas. Pour tout te dire, tout m'est revenu que le lendemain, je ne me souvenais plus de rien avant ça.

La gueule de bois laisse parfois de gros trou noir et c'est souvent les trucs les plus affreux qui ne reviennent pas. Là c'était revenu 24h après et elle n'en était pas fière, d'ailleurs elle reprit, comme pour minimiser un peu sa faute.

_ On ne peut pas dire que je t'ai vraiment trompé, c'est Ellen... on... ça ne voulait rien dire du tout et puis tu sais que je n'aime pas les femmes, ce n'est pas aujourd'hui que je vais me mettre à changer de bord.

Pas sur que Holden pense la même chose mais elle se justifiait quand même. Il le fallait bien après tout, elle ne pouvait pas laisser son mariage voler en éclat encore plus qu'il ne l'était déjà.

C’est idiot. Malgré l’humiliation que Jane et lui avaient subie sous les yeux choqués de leurs enfants quelques jours plus tôt, Holden avait été persuadé que le pire était derrière eux. Les tensions au sein de leur couple s’étaient cumulées suite au décès de Luke, et malgré quelques erreurs de parcours, les deux époux avaient semblés s’être retrouvés. Oubliés la froideur et le manque d’intimité, leur duo s’étaient ressoudés ! Cette réalisation l’avait apaisé et lui avait donné de l’espoir pour le futur. Maintenant, Holden voyait cette amélioration pour ce qu’elle était : une illusion. Comment était-il maintenant censé croire que Jane avait mis au point cette petite soirée romantique pour une raison autre que se racheter une bonne conscience ? Une preuve d’amour et de passion aussi vide que les accusations qu’elle s’acharnait à ressasser. Holden et sa femme n’étaient plus sur la même longueur d’onde. Comment pouvaient-ils l’être alors que Jane ne semblait pas lui faire confiance et que fricoter avec ses amis semblait être une alternative acceptable ? Holden soupira, se passant une main sur le visage dans un vain effort d’en chasser la frustration. Il s’approcha de la fenêtre et pris de grandes inspirations en laissant son regard se perdre dans la verdure d’un parc et le circuit routinier des voitures. Il ne se retourna pas d’avantage lorsque Jane s’excusa. Qu’aurait-il pu ajouter ? Que cherchait-elle à entendre ? Bien sur qu’elle n’aurait pas dû ! Sa voix avait perdu de sa vigueur et elle semblait juste épuisée. Ils avaient ça en commun au moins. Les derniers mois n’avaient pas étaient plus reposants et Holden voulait juste un break. Etait-ce trop demander ? De nombreuses fois il s’était tenu devant une assemblée pour clamer haut et fort que les choses arrivent pour une bonne raison, mais cette certitude commençait fortement à perdre de sa force. Jane continua dans sa justification et Holden l’écouta, tournant l’légèrement le visage vers elle sans pour autant lui faire face. Encore heureux que ce n’était pas une vengeance, puisqu’il n’y avait littéralement rien à venger ! S’il s’était avéré que Jane l’avait trompé en pleine connaissance de cause en pensant que son mari avait couché avec Joan, Holden se serait trouvé obligé de quitter la pièce. Cela aurait atteint des niveaux de paranoïa et de folie qu’Holden était incapable de gérer. Ah, l’alcool. Tellement pratique. « L’alcool n’excuse pas tout. Nos actes ne viennent pas de nulle part. Quelque part au fond de toi tu avais conscience de ce que tu faisais » répondit-il silencieusement. « Et comment suis-je censé savoir que ça ne se reproduira pas avec quelqu’un d’autre ? » demanda-t-il en se retournant. Car n’était-ce pas là la vraie question ? Il s’agissait d’Ellen cette fois, mais la prochaine fois ce sera peut être un homme aux côtés desquels elle abusera de la boisson. D’ailleurs, Jane se défendit en assumant son hétérosexualité. Super, le voilà soulagé. Holden secoua la tête, un sourire mauvais aux lèvres. « Homme ou femme, ça ne change rien ! Le principe reste le même ! » s’emporta-t-il. « Si tu commences à croire que c’est acceptable puisque ça ne voulait rien dire, où est la limite Jane ?! ». Peut être bien que ce n’était qu’une erreur de parcours, mais vu sa chance dernièrement, Holden n’était pas prêt à en parier.

Maintenant que l'aveu était sorti, il fallait en assumer les conséquences. Et Jane savait mieux que personne que ce qu'elle avait fait était impardonnable. Holden a certains principes qu'elle partage depuis toujours. Hors là, elle avait faiblit, ce n'était pas acceptable. Elle ne pouvait pas minimiser les choses, bien qu'elle tenta tout de même. Cela dit, le fait qu'elle ait couché avec une femme plutôt qu'un homme joue quand même en sa faveur. Holden aurait certainement réagit plus intensément s'il avait apprit qu'elle s'était tapé un autre homme.
Elle le regarda se tourner vers la fenêtre. Il avait sans doute besoin de temps pour tout assimiler. Elle aurait peut-être du se taire et le laisser encaisser. Mais la rouquine a toujours été du genre bavarde alors ce n'est pas aujourd'hui que ça va changer. Elle argumenta de toutes les façons possible pour se racheter à ses yeux mais évidemment ce n'était pas suffisant. Il avait raison, elle le savait. Elle aurait réagit comme lui. Peut-être même plus violemment que lui.

_ Je n'avais pas conscience de ce que je faisais...

elle allait aller plus loin mais il l'arrêta avec une question qu'elle n'attendait pas. Comment être sur qu'elle ne recommencerait pas ? Alors quoi, il la prend pour qui là ? Jane n'est pas du genre à coucher à droite à gauche, il doit bien le savoir quand même. Il ne peut pas perdre totalement confiance en elle pour une simple petite erreur de parcours.

_ Bien sur que ça ne se reproduira pas ! Tu sais bien que je ne suis pas de ce genre voyons !

Elle ne pensait pas à un éventuel homme, elle pensait tout simplement qu'il parlait d'Ellen. Comment être sur qu'elle ne remettra pas ça avec sa meilleure amie. Bah tiens, parce qu'elle n'est pas lesbienne tout simplement ! Et puis Ellen non plus d'ailleurs. Elles ont assez parlé de mec et de pénis pendant cette soirée arrosée pour être certaines de leur orientation sexuelle.

_ Je n'ai jamais dis que c'était acceptable, je dis simplement que ça ne voulait rien dire. Tout est tellement compliqué entre nous dernièrement et puis Ellen aussi de son coté, ça a du nous rapprocher j'en sais rien. J'étais complètement bourrée et tu sais que je tiens très mal l'alcool en vieillissant.

En étant jeune, elle avait fait énormément de connerie du à l'alcool également, alors forcément avec l'âge ça n'arrange pas les choses. Et puis plutôt que de s'écraser pour le laisser encaisser, elle se défendait en haussant le ton comme lui. Pas question de se laisser faire, surtout que l'histoire avec Joan était toujours dans un coin de sa tête.

_ J'ai franchis la limite, t'es content ? Je l'avoue moi au moins !

Dans une technique vieille comme le monde, Holden avait continue à parler au dessus de sa femme, souhaitant aller jusqu’au bout de sa pensée et n’aimant de toute manière pas du tout où elle semblait aller. Pas conscience. Bah voyons. Cette manie de vouloir se défaire de toute responsabilité le mettait hors de lui. Elle et elle seule avait été coupable de ses actes et rien aux yeux d’Holden allait atténuer la faute. Etait-ce si tirer par les cheveux de penser qu’une telle chose pourrait se reproduire ? Jane semblait le penser vu la manière dont elle s’offusqua. Sa réplique l’amusa presque, un rictus mauvais étirant ses lèvres. Elle semblait tellement sure d’elle-même. « J’en sais rien Jane, je pensais savoir très bien dans quel genre te situer, mais maintenant je ne suis plus sûr de rien » rétorqua-t-il en levant les bras au ciel avant de faire retomber ceux-ci bruyamment contre ses cuisses. S’il y avait bien une version de l’histoire à laquelle il croyait, c’était à l’aspect complètement aléatoire et spontané de cette étrange expérience lesbienne. Holden savait très bien ce qui faisait vibrer sa femme et il ne pensait pas s’être trompé au point d’ignorer son possible attrait pour les femmes. Mais encore une fois, ce n’était pas le problème. En cet instant, Holden était terrifié de se retrouver dans une position similaire dans plusieurs semaines, plusieurs mois : Jane lui annonçant une nouvelle tromperie. Une indiscrétion moins surprenante, plus sérieuse, peut être avec un homme qu’elle décidera de suivre. L’expérience Joan lui avait suffit. Et si Holden savait reconnaître que son premier mariage restait une passion d’adolescent devenu sérieux un peu trop vite, rien de comparable avec Jane, son égo n’était pas sur de supporter le même schéma répété deux fois. Et voilà que Jane continuait avec son « ça ne voulait rien dire », tentant encore et encore de justifier l’injustifiable. « Et alors, Jane ?! Mets-toi deux secondes à ma place. Accepterais-tu les mêmes excuses si j’étais allé tripoter le premier qui passe juste parce que nos vies sont un peu compliquées en ce moment ? ». Holden était habitué à être de ce côté de la conversation. Jamais il n’avait fait subir la même chose à quelqu’un, et pendant un instant Holden souhaitait fortement que sa femme puisse être capable de ressentir la même injustice que lui. Un homme plus indulgent aurait peut être déjà passé l’éponge, reconnu les dégâts de l’alcool et tenter de reconstruire son couple fragile. Holden n’était pas cet homme. Et puis enfin, ce qu’il avait attendu depuis le début de cet aveu arriva. Elle assuma son acte. Si seulement elle n’avais fait que ça, mais non. Il avait fallu qu’elle remette une couche avec son accusation insensée. « Je ne peux pas continuer comme ça » répondit-il d’un ton étrangement calme, la lassitude de cette conversation pesant enfin sur lui. « On en reparlera quand tu seras plus raisonnable ». A quoi bon rester, ils ne faisaient que tourner en rond. Sans plus un mot, Holden tourna les talons et quitta la pièce.