Bien que j’étais enceinte, je ne comptais pas abandonner mon projet de court métrage. Après tout, je devais obtenir un résultat mais je refusais d’avancer tant que je n’avais pas l’accord de Patrick pour qu’il travaille avec moi. Je tenais à l’avoir pour mon court métrage. Mais cet idiot prétentieux ne répondait pas à mes demandes. Je devenais folle à ne pas avoir son accord sauf que c’était très mal me connaître de croire que j’abandonnerais. Je reconnaissais cependant que cela fait plusieurs mois que mes contacts n’étaient pas vraiment conventionnels. On pouvait dire que je l’avais harceler tout simplement. En même temps, il pourrait s’économiser du temps et des soucis en me disant simplement oui. J’avais conscience que ce n’était pas la bonne méthode mais j’avais essayé toutes les méthodes orthodoxes pour le contacter et lui faire lire mon scenario mais jusqu’à présent, c’était tout simplement sans succès.

Je savais que Patrick faisait un footing assez régulièrement dans le coin. Je m’étais donc installée sur son parcours et j’attendis simplement qu’il finisse par faire son apparition. Après une heure d’attente à prendre un bain de soleil sur un banc, je le vis arriver en courant au détour d’un virage. Je me levais alors pour me mettre sur sa route avec les bras croisés. Je le fixais volontairement afin de le forcer à s’arrêter. « Vous savez, ce n’est pas facile de vous approcher. Sauf que j’en ai vraiment marre là. » Dis-je en phrase d’introduction. Il m’aurait sans doute valu le brosser dans le sens du poil, mais je n’avais pas envie de faire cela. J’avais mon scenario dans mon large sac. Mes bras croisés, je sentais mes hormones s’agacer déjà alors que le pauvre homme (enfin pas si pauvre homme que cela) n’avait encore rien dit. Il fallait dire que j’étais déjà très vive niveau caractère en temps normal alors autant vous dire qu’avec ma grossesse, j’étais beaucoup plus dure à vivre. Il n’allait pas devoir me résister une éternité si il voulait pouvoir finir son jogging tranquillement.

Patrick avait toute la journée devant lui pour faire ce qu'il voulait. Pour une fois, il n'avait aucune obligation professionnelle et n'avait pas l'intention de s'en créer. Pour démarrer, après une grasse matinée jusqu'à neuf heures, l'irlandais s'extirpa de son lit king size pour aller dans la cuisine et se préparer un smoothie. Pas de thé ni de petit-déjeuner à l'horizon pour le moment. Non, l'acteur oscarisé avant en tête de faire le plein de vitamines et d'aller fouler au pas de course le sentier gravillonné de l'un de ses parcs préférés en ville. Les séances de jogging dans la campagne et les bois irlandais lui manquaient parfois faute de merle on mange des grives. Une fois les fruits mixés, il versa le contenu du blender dans un grand verre et réserva l'excédent au réfrigérateur.

Verre à la main, Patrick alla dans son dressing pour récupérer les éléments de la tenue du parfait joggueur et enfila les fringues une à une. Il acheva de lacer ses chaussures assis sur le canapé et vida d'un trait le reste de son smoothie. Le comédien prit ses clés, son téléphone et quitta sa maison. Sur le palier il vissa es écouteurs intra-auriculaires sur ses oreilles, démarra sur Spotify la playlist qu'il s'était constitué pour ses séances sportives et démarra sa course. L'irlandais gagna le parc en une dizaine de minutes en suivit tranquillement le petit chemin tracé qu'il affectionnait. Arrivé à mi-parcours pour achever un tour il vit une femme blonde, enceinte, se placer au milieu du chemin bras-croisés comme si elle l'attendait de pied ferme. Par acquis de conscience, Patrick tourna la tête pour vérifier s'il y avait quelqu'un d'autre mais non il était bien seul sur la piste. Et en s'approchant l'acteur crut reconnaître l'intéressée. Il pesta intérieurement et bien qu'il eut été facile de faire un écart pour contourner la scénariste, le trentenaire préféra affronter le dragon hormonal qui lui faisait face. Plus vite il l'enverrait paître, plus vite il pourrait reprendre son jogging. « Qu'est-ce que vous me voulez encore ? » demanda l'acteur de manière peu amène. Elle n'était pas cordiale, lui non plus.

Mon projet bloquait purement et simplement car je ne voyais tout simplement personne d’autres pour jouer mon salopard de père. Il avait le physique de l’emploi. Je me refusais de changer d’idée et têtue dans l’âme, je ne comptais pas abandonner. Cela faisait cependant plusieurs mois que j’étais à la limite de l’illégalité dans mon comportement. J’avais parfaitement conscience que cela pouvait être qualifié par un juge de harcèlement. Mais ce cour métrage était ce que je considérais comme le projet de ma vie, je devais, j’en ressentais l’intime besoin pour réussir à avancer dans ma vie, surtout maintenant que j’allais devenir mère.

Le beau brun arriva finalement et s’arrêta devant moi. Il me demanda alors ce que je lui voulais. Je levais alors les yeux aux ciels tout en ne décroisant pas les bras. « Je pensais que vous aviez au moins un ou deux neurones. » J’eu un mouvement négatif de la tête avant de lâcher un long soupire. « Ecoutez.. » dis-je en me passant une main sur le front et ensuite dans les cheveux. « Vous savez maintenant que je suis coriace et que je n’abandonnerais pas. » Je pris une grande inspiration en essayant de me détendre. Je savais que je devais essayer de faire des efforts car je m’emportais beaucoup plus vite depuis que j’étais enceinte.

« Il serait tellement plus simple pour vous et moi, avec une belle économie d’énergie, que vous m’écoutiez et me laissez vous montrer mon projet. » Je ne détournais pas le regard. Je n’étais pas le gendre de femme à éviter le regard de quelqu’un. Mon regard avait toujours été très franc et cela ne risquait pas de changer maintenant. J’étais curieuse de voir si il allait se montrer suffisamment intelligent pour m’écouter. Cependant, je n’avais pas été totalement honnête avec lui, car je ne cesserais pas temps qu’il n’aurait pas accepté. Mais pouvoir lui parler clairement allait me permettre de me donner des chances pour le convaincre.

Patrick prit une profonde inspiration pour contenir son agacement face au comportement de la trentenaire qui se tenait face à lui. Si insinuer qu’il était un abruti était sa manière d’essayer de l’amadouer, elle se fourrait le doigt dans l’oeil jusqu’au coude voire même l’épaule. Et lui qui avait pensé pouvoir passer un moment tranquille dans ce parc en faisant un simple jogging, lui aussi s’était bien trompé. L’irlandais, depuis le temps, avait bien compris que Caitlyn n’avait aucune intention de lâcher l’affaire avec son projet mais la blonde devait comprendre que dans le milieu dans lequel ils évoluaient les choses ne se passaient pas ainsi. « Il serait regrettable d’avoir recours à la justice pour que vous me fichiez la paix. » menaça-t-il. Depuis son arrivée aux Etats-Unis quelques années plus tôt, le comédien n’avait jamais rencontré une pareille situation. Il y avait des agents chargés de représenter les comédiens et ils recevaient des dizaines et des dizaines de scénarios par jour. Ils les lisaient faisaient le tri. Patrick faisait relativement confiance à son agent américain et cela lui avait rapporté un oscar. Partant de là, il ne voyait pas de raison d’en changer pour le moment. « Je crois que vous ne m’avez pas bien compris. Envoyez votre projet à mon agent et il transmettra » Les agents étaient justement là pour éviter ce genre de déconvenues. Si tous les scénaristes agissaient comme Caitlyn, Patrick ne pourrait pas faire un pas dans la rue sans être interpellé pour une publicité, un long métrage ou un court-métrage. Et puis l’avantage d’un agent était aussi qu’il gérait le planning de Patrick. Car il est bien beau de vouloir faire un projet mais parfois les choses ne font pas tout simplement en raison des disponibilités des personnes. Et depuis qu’il avait reçu la récompense ultime, le beau brun était sacrément sollicité. Entre les tournages qui allaient s’enchaîner et les divers projets sur lesquels il était impliqué, (dernièrement il s’était vu offrir de faire du doublage pour un des personnages du prochain film des Studio Pixar. « Et comprenez bien chère madame que je n’ai aucune envie de vous faciliter les choses. Vous commencez à abuser sérieusement de ma patience. » Patrick doutait que cela suffise pour qu’elle le laisse s’en tirer mais au moins ces mots avaient le mérite d’avoir été dits.

J’eu un rire agacé lorsqu’il me menaça de recours en justice. « Vous savez très bien que cela serait sans effet. » Il était clair qu’une restriction de justice n’allait pas m’arrêter. Me mettre des bâtons dans les roues, clairement oui, car cela rendrait tout plus compliqué. Mais cela ne ferait que me rendre encore plus déterminé. Il me renvoya alors l’évidence de l’agent en plein visage. Je levais les yeux d’agacement. Il ne semblait pas avoir de cervelle ni même de volonté. Il continuait en disant que j’abusais de sa patience. Je ne pouvais pas lui nier que j’abusais sans doute très fortement mais je n’allais clairement pas m’en excuser. Je baissais un instant le regard pour garder une certaine patience.

« Il y a que l’argent qui vous intéresse en faite ? Le fric le fric et encore le fric, ah et aussi avoir des petites minettes qui fantasment sur vous ? » Je posais mon regard sur lui, un éclair de colère dans le regard. « J’ai envoyé des dizaines et des dizaines de fois à votre agent mon court-métrage pour qu’il vous le transmettre, à chaque fois il m’a renvoyé en disant que vous vous abaisseriez pas à faire ce court métrage ! » Au fur et à mesure que je parlais, je sentais mes palpitations devenir plus forte, la colère tout comme l’émotion à cause des hormones montait en moi. « Alors oui, au bout d’un moment, je suis passée à une autre étape car je veux que vous le lisiez ! Que vous donniez une chance à ce que je raconte ! » Je fis une pause avec un mouvement de dégout.

« Vous savez quoi ? Vous ne méritez pas un oscar. Vous n’êtes pas un acteur. Un acteur c’est celui qui recherche à raconter une histoire, à transmettre une émotion peu importe le support, peu importe le fric que cela peut lui rapporter ! Vous n’êtes pas ça. » Faisant un signe négatif de la tête, je repris en posant mon regard dans le sien. « Vous êtes comme lui. Vous seriez tellement parfait pour le représenter. Vous croyez que je vous ai choisi pour votre popularité ? Clairement pas. Vous êtes un excellent acteur, mais aujourd’hui, je constate simplement que vous êtes pourri par le système. Je ne sais pas comment vous faites pour vous regarder dans une glace. » Dans un dernier mouvement, je jetais mon script à ses pieds, déplaçant un nuage de poussière. « Je vous conseille de recadrer votre agent. Chaque réalisateur commence par des courts métrages. L’industrie du cinéma ne néglige pas les courts métrages, les oscars les consacrent même. Un agent ne cherche pas l’artistique, il cherche le fric. » Je détournais le regard. « Remarque, vous vous êtes bien trouvés. »

Il était vrai qu'un papier du tribunal n'arrêterait sans doute pas la scénariste mais Patrick commençait à être à court d'idées pour gagner sa tranquillité. L'irlandais n'allait tout de même pas risquer d'envoyer une femme - enceinte de surcroît - derrière les barreaux. Et puis dépenser des milliers de dollars et du temps dans un cabinet d'avocats et une procédure judiciaire n'était pas une expérience qu'il avait envie de connaître. L'échange n'était pas plaisant ni pour lui ni pour elle, le comédien se demandait encore pourquoi Caitlyn leur imposait cela. Il y avait des dizaines et des dizaines d'acteurs sur le marché, et même des plus talentueux que lui, pourquoi diable ne lâchait-elle pas l'affaire avec lui ?

Naïvement, Patrick pensa que cela s'arrêterait là, mais non, la blonde chercha à être blessante. Il ne connaissait pas la jeune femme mais celle-ci prétendait tellement bien le connaître. Et pourtant, elle était à des lieux de la vérité. Croisant les bras, et faisant ressortir ainsi ses muscles entretenus à renforts de séances de crossfit, il écouta, bien obligé, les déblatérations de la trentenaire. « Midinettes dont vous devez sûrement faire partie compte tenu de votre acharnement » commenta-t-il l'air goguenard. Caitlyn lui expliqua qu'elle avait déjà envoyé le scénario à son agent mais que celui-ci n'avait pas jugé bon de lui transmettre le script de l'intéressée. Puisqu'ils étaient lancés, Paddy continua sur la voie engagée. « Si mon agent ne me l'a pas transmis, c'est peut-être parce que votre scénario n'est pas aussi bon que ce que vous pensez. On accorde souvent beaucoup de crédit à ses écrits mais cela ne veut pas dire que c'est bon pour autant » ajouta-t-il en haussant les épaules. C'était un peu facile, méchant et gratuit de dire cela sans avoir lu le script mais au point où ils en étaient.

Et à nouveau Caitlyn parla sans savoir du rapport de Patrick avec l'argent. Elle se trompait lourdement sur son compte, comme beaucoup. Il était riche c'était indéniable mais pour autant il n'oubliait pas la campagne irlandaise qui l'avait vu naître. Son rapport au show business avait été très précoce et c'était sans doute pour cette raison que le succès ne lui montait pas à la tête et qu'il ne vivait pas en plein coeur de Beverly Hills dans une immense villa dont il ne ferait jamais le tour et ne connaîtrait pas toutes les pièces. « Pour ce qui est de mon oscar, je pense que beaucoup partagent votre opinion mais ce ne fut pas le cas des membres du jury. Désolé mais pas désolée ma chère. Quant à l'argent et l'utopie du métier de comédien, vous ne me ferez pas croire que vous faites ce court métrage pour la beauté de l'Art. Allons soyons un petit peu sérieux, vous vendrez votre travail, s'il est si bien que vous le pensez, cela fera une jolie mention sur votre CV, et qui sait ? Peut-être même qu'il sera récompensé en festival et vous ne cracherez pas sur le petit chèque qui accompagne le prix. Inutile de me faire la morale, nous bossons dans le même secteur »

Et puis des projets pour la beauté de l'Art, pour la gloire comme on dit, Patrick en avait fait plus d'un. Les courts-métrages, les clips et autres, il connaissait. Il en avait fait, il en faisait encore. Beaucoup moins, par manque de temps essentiellement, mais cela lui arrivait toujours. Et côté argent, l'irlandais était friand des circuits de financements alternatifs. Les kisskiss bankbank et compagnie faisaient partie de ses favoris et il donnait régulièrement de l'argent pour aider les projets qui le touchaient. Parfois il utilisait un pseudonyme, parfois son nom d'artiste cela dépendait.

Le scénario du court-métrage de Caitlyn atterrit à ses pieds et l'irlandais observa les pages reliées en haussant un sourcil. « Il faudrait prendre un peu plus soin de vos affaires, love » Il s'accroupit pour ramasser l'objet qu'il épousseta en se relevant. « ça me donne encore moins envie de le lire » commenta-t-il juste pour le plaisir de provoquer encore un peu la scénariste. Il soupira en sachant qu'il allait regretter ses paroles mais il se lança tout de même. Il se gratta un sourcil et déclara : « Ok, vous avez gagné. Si je lis votre scénario ici et maintenant, vous promettez de me laisser tranquille après ça ? »

Etait-ce une bonne idée de s’énerver en cette période de ma grossesse ? Clairement pas. Cependant, il n’était pas non plus très malin de la part de l’acteur de m’enrager. Je sentis une contraction mais je l’ignorais clairement car je me sentais hors de moi par rapport à ce que j’entendais. Moi une midinette ? mon script nul ? moi attiré par l’argent ? Je m’approchais alors de lui arrachant mon propre script avant de le rouler d’un pas rapide et de lui frapper le bras. « Comment osez vous ! Comment osez vous porter un jugement sur mon travail alors que vous ne le connaissez pas ! » Plus je parlais, plus je frappais fort , la colère m’envahissant totalement. « Mon travail a été primé par la société des auteurs ! J’ai gagné un prix pour ce travail, j’ai gagné de l’argent pour financer cette production ! » Si je n’appréciais pas la majorité de ces critiques mais ce qui me faisait le plus de mal était d’entendre de sa part que mon travail ne méritait pas son attention.

Lâchant finalement mon script, je m’éloignais de l’acteur sentant soudainement une nausée m’envahir et une crampe me serrer l’estomac. Difficilement, je me dirigeais vers un banc sur lequel je me laissais tomber tout en essayant de reprendre une respiration normale. Ma respiration était tellement rapide que j’avais mal à la tête. Je savais que j’étais sensible à l’énervement, que mon corps le supportait mal, d’autant plus depuis ma grossesse mais je me détestais pour ressentir ce trouble à cet instant même. Pourquoi ne pouvais-je pas être en colère comme je le souhaitais au moment où je le souhaitais. Je n’aimais pas montrer mes faiblesses et encore moins devant cet homme qui m’exaspérait au plus au point. Il refusait de donner une chance à mon travail jusqu’à présent salué par tout le monde. Je n’avais certes jamais accepté l’échec, mais j’acceptais encore moins l’injustice et l’entêtement qui en était la cause de la part de l’acteur. Je reconnaissais que je m’y prenais mal mais j’étais bien trop impliquée émotionnellement pour en avoir une pleine conscience.

Alors que la femme enceinte se déchaînait contre lui à coups de script roulé, le comédien fut bien obligé de reculer un peu pour tenter de se sauver un peu de la furie bien décidée à lui assassiner le bras. La blonde avait mine de rien de la force et il n’était pas spécialement adepte du sado-masochisme. Et puis avec tout le travail qu’il avait en ce moment, il fallait qu’il prenne soin de lui, ce n’était pas le moment d’avoir des bleus. Cependant, la réaction de la scénariste prouvait tout de même quelque chose, ce qu’il lui avait dit avait touché une corde sensible. Il n’y avait pas perdu au change. Quand Caitlyn cessa enfin de frapper, l’irlandais la vit de nouveau lâcher son script et partir trouver refuge sur le banc tout proche. Pour la seconde fois, Patrick s’accroupit pour ramasser le scénario et vînt rejoindre Miss Hemingway.

Il s’assit à ses côtés tout en gardant tout de même une certaine distance de sécurité. Il avait conservé l’arme de son précédent méfait à la main mais rien ne disait que son sac ne contenait pas autre chose qui aurait pu faire plus mal. « ça chère madame c’était pour vous apprendre à dénigrer mon travail et me juger sans me connaître » lança l’acteur avec un grand sourire de satisfaction. Paddy lui faisait un peu la leçon mais dans ce business on ne cessait jamais d’apprendre et souvent à ses dépends. Il croisa les bras et entendit ses jambes devant lui. « Cela dit, je ne peux pas vraiment vous en vouloir, vous n’êtes pas bien différente des autres sur ce point. » Sa séance de sport était bel et bien fichue. Il observa la trentenaire à ses côtés du coin de l’oeil avant d’ajouter : « Faites-en ce que vous voulez, mais vous devriez essayer de vous relaxer. Et parce que je suis un homme fort sympathique et pas si rancunier que cela, je peux même vous aider. Comprenez que je n’aimerais pas à avoir à appeler une ambulance et devoir jouer le père très inquiet de votre futur enfant pour vous accompagner à l’hôpital. »  Il était un peu salaud de procéder de la sorte mais après tout, Caitlyn l’avait cherché, maintenant elle l’avait trouvé.

Je n’avais jamais ressenti une telle peur liée à une douleur. Je n’étais pas une chochotte, je savais avoir mal, supporter la douleur. Mais depuis que j’avais commencé ma grossesse, je devais avouer que je paniquais beaucoup plus et je me trouvais plus sensible. J’étais à l’écoute de mon corps car je ne souhaitais pas qu’il arrive quelque chose à mon enfant. Assise sur ce banc, je tenais mon ventre et je me fichais soudainement totalement de mon objectif premier, c’est à dire convaincre cet acteur. Une part de moi me disait que finalement nous n’étions sans doute pas fait pour travailler ensemble et pourtant dieu sait que j’avais absolu voulu travailler avec lui pour son talent et sa ressemblance avec mon père jeune.

Je restais silencieuse cherchant à comprendre ce qui pouvait se passer. Je savais que j’étais sensible à la tension mais sans doute pas à ce point là. J’avais du m’énerver plus que je n’aurais pu le croire. L’acteur resta assis à côté de moi et se permit des réflexions à mon sujet. Je posais mon regard noir sur lui. « Allez-vous faire foutre. » J’eu un mouvement négatif de la tête avant de plisser les yeux de douleur avec un léger soupire. Je continuais d’appuyer sur mon ventre pour essayer d’apaiser ma douleur et espérer sentir mon enfant. Je ne sais pas si cela pouvait réellement me rassurer ou non mais j’essayais, il me semblait assez difficile pour moi de réfléchir.

« C’est pas normal. » Décidément, je m’inquiétais réellement et mon instinct me disait que ce n’était pas normal, vraiment pas normal que cela ne passe pas. Refusant de regarder Patrick par simple fierté. J’essayais alors de me lever avant d’avoir un nouveau pique de douleur me faisant gémir avant de m’asseoir à nouveau. « Je dois aller voir un médecin. » Ma voix était soudainement à peine audible car il était en plein d’inquiétude. Ma colère contre Patrick me semblait totalement ridicule.

Ainsi après la petite leçon que venait de lui donner l'irlandais, la scénariste l'envoya paître. Le regard noir qu'elle lui adressa en le faisant agrandit le sourire du comédien. La situation n'était pas particulièrement risible compte tenu de l'état de Caitlyn mais il prenait sa réaction avec une certaine satisfaction. N'étant pas qu'un malotru, l'acteur oscarisé proposa son aide à la trentenaire pour que celle-ci se calme après l'épisode nerveux qu'elle venait de connaître. La scénariste éluda sa proposition et en tournant la tête vers elle il la vit en proie à une véritable souffrance. L'attitude de la blonde lui fit hausser un sourcil. Etait-il allé un peu trop loin tout à l'heure ? Il soupira, l'heure n'était pas à s'inquiéter de cela, le sportif avait mieux à faire en essayant d'améliorer la situation.

Il prit la main de Caitlyn pour attirer son attention et d'une voix calme qui se voulait réconfortante il se lança : « Il y a un cabinet médical à la sortie du parc derrière nous. Je peux vous aider à y aller ou est-ce que vous préférez que j'appelle une ambulance ? » Si l'intéressée ne pouvait vraiment pas marcher, il pourrait toujours la porter. Malgré l'image que la scénariste pouvait avoir de lui, Patrick était tout de même un garçon bien élevé et il n'allait pas abandonner une demoiselle en détresse au milieu du parc. La distance n'était pas trop importante et ce serait toujours une manière de faire un peu de musculation. Ce serait une maigre consolation mais ce serait toujours cela de pris. « Et par pitié, ne faites pas votre tête de mule, cela ne vous avancera à rien et il n'est pas question que je vous laisse là comme ça. » ajouta-t-il en craignant une vague de protestation de la part de la blonde. «Plus vite vous vous déciderez, plus vite vous serez débarrasée de moi » fit-il en lui faisant un clin d'oeil.